Menu
Libération
Examen de conscience

La France «aurait pu arrêter le génocide» au Rwanda mais n’en a «pas eu la volonté», estime Macron

Génocide des Tutsis au Rwandadossier
Le président, qui avait déjà reconnu en 2021 les «responsabilités» de la France dans le génocide, s’exprimera ce dimanche 7 avril à travers une vidéo.
Emmanuel Macron s'exprime à côté du livre des visiteurs sur le site du mémorial du génocide dans la capitale Kigali, au Rwanda, en 2021. (Muhizi Olivier/AP)
publié le 4 avril 2024 à 18h26

En 1994, près d’un million de personnes sont mortes en l’espace de seulement trois mois au Rwanda. Pour Emmanuel Macron, la France «aurait pu arrêter le génocide» «avec ses alliés occidentaux et africains», mais «n’en a pas eu la volonté», a rapporté ce jeudi 4 avril l’Elysée, en amont du 30e anniversaire du début des massacres. Un pas supplémentaire.

Le président, qui avait déjà reconnu en 2021 les «responsabilités» de la France dans le génocide, s’exprimera dimanche «par une vidéo qui sera publiée sur ses réseaux sociaux», a déclaré son entourage. Il «rappellera notamment que, quand la phase d’extermination totale contre les Tutsis a commencé, la communauté internationale avait les moyens de savoir et d’agir, par sa connaissance des génocides que nous avaient révélée les survivants des Arméniens et de la Shoah, et que la France, qui aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, n’en a pas eu la volonté», a ajouté la présidence.

Ce dimanche, a poursuivi l’Elysée, Emmanuel Macron réaffirmera aussi «que la France est aux côtés du Rwanda, du peuple rwandais, en souvenir d’un million d’enfants, de femmes et d’hommes martyrisés parce que nés Tutsi. Il redira l’importance du devoir de mémoire mais aussi du développement des savoirs de référence et de leur diffusion, en particulier par l’éducation des jeunes générations en France».

«C’est un pas en avant, incontestablement»

Les réactions n’ont pas tardé. Il «va encore plus loin que le rapport Duclert (rendu en 2021 par une commission d’historiens, il soulignait la responsabilité de la France, ndlr) et que la déclaration qu’il a faite à Kigali», s’est réjoui Marcel Kabanda, président de Ibuka France, principale organisation de mémoire, justice et soutien aux rescapés du génocide des Tutsis. «Je me félicite qu’il donne de la France cette image positive d’un pays qui reconnaît ses torts et qui grandit en reconnaissant son histoire», a-t-il dit à l’AFP.

«C’est un pas en avant, incontestablement», a aussi réagi l’historien Vincent Duclert, qui y voit «une reconnaissance extrêmement forte» de «toutes les fautes» que «la France a commises à partir du début des années 90 au Rwanda». «On sentait que la France était peut-être un peu en retrait sur cette 30e commémoration, et là le président, la France revient vraiment au premier plan», a-t-il ajouté sur France Inter. Très impliquée dans ce dossier, l’association Survie a de son côté demandé que la France aille encore plus loin en «reconnaissant officiellement» une «complicité de génocide».

Le 27 mai 2021, c’était depuis Kigali, la capitale du Rwanda, que le président de la République avait reconnu les «responsabilités» de la France dans le génocide après la remise du rapport Duclert. «Alors que des responsables français avaient eu la lucidité et le courage de le qualifier de génocide, la France n’a pas su en tirer les conséquences appropriées», avait-il affirmé, ajoutant : «Nous avons, tous, abandonné des centaines de milliers de victimes à cet infernal huis clos.» Il avait précisé que Paris n’avait «pas été complice» des génocidaires hutus, et n’avait pas présenté d’excuses, tout en disant espérer le pardon des rescapés.

Invité par le président rwandais Paul Kagame aux commémorations du 30e anniversaire du génocide dimanche, Emmanuel Macron ne s’y rendra pas. Il sera représenté par son ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, et le secrétaire d’Etat chargé de la Mer, Hervé Berville, né au Rwanda.

Mis à jour à 20 h 10 avec contexte et réactions.