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Libération
Tensions

La justice française s’oppose à l’extradition vers l’Algérie d’un ancien ministre de Bouteflika

La chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence s’est opposée ce mercredi 19 mars aux six demandes d’extradition vers l’Algérie d’Abdeslam Bouchouareb, en raison de son âge et de son état de santé.
Abdeslam Bouchouareb, alors ministre de l'Industrie et des Mines, à Alger le 21 février 2017. (Billal Bensalem /Nur.AFP)
publié le 19 mars 2025 à 10h47
(mis à jour le 19 mars 2025 à 10h47)

Voilà qui ne devrait pas arranger les relations déjà houleuses entre l’Algérie et la France. Après qu’Alger a retoqué la liste de ressortissants que la France avait pour projet d’expulser, la justice française a opposé ce mercredi 19 mars un avis défavorable aux six demandes d’extradition vers l’Algérie d’Abdeslam Bouchouareb, ministre de l’Industrie et des Mines de 2014 à 2017 sous la présidence d’Abdelaziz Bouteflika, mettant définitivement fin à cette procédure. Evoquant les «conséquences d’une gravité exceptionnelle» que pourrait avoir cette extradition en raison de «l’état de santé et de l’âge» de d’Abdeslam Bouchouareb, 72 ans, la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence a estimé que cela porterait atteinte à l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et à l’article 5 de la Convention d’extradition franco-algérienne de 2019.

L’Algérie réclamait depuis près de dix-huit mois l’extradition de l’ancien ministre, désormais installé dans les Alpes-Maritimes, afin qu’il exécute cinq peines d’emprisonnement de vingt ans chacune et afin de le poursuivre dans un sixième dossier d’infractions économiques et financières. La chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence a donc suivi le réquisitoire du parquet, qui s’était opposé à cette demande d’extradition à l’audience du 5 mars : «L’éloignement de M. Bouchouareb, gravement malade, ferait courir à celui-ci, si ce n’est un risque de vie, [un risque] de déclin rapide et irréversible de son état de santé», avait estimé l’avocat général, Raphaël Sanesi de Gentile.

«Si on envoie M. Bouchouareb en Algérie, c’est pour y mourir»

Conseil de l’Algérie, Me Anne-Sophie Partaix avait quant à elle estimé que les autorités judiciaires avaient, le 13 février, «donné les garanties nécessaires» à la justice française : «Abdeslam Bouchouareb a volé de l’argent aux Algériens, il a été condamné et doit répondre de ses actes», avait-elle insisté, sans succès, donc.

«L’aspect politique [de cette demande d’extradition] crève les yeux, si on envoie M. Bouchouareb en Algérie, c’est pour y mourir», avait plaidé son avocat, Benjamin Bohbot, évoquant deux anciens Premiers ministres et plusieurs membres du gouvernement condamnés en 2020 à de lourdes peines de prison. Me Bohbot a toujours présenté son client comme une victime des «purges» de l’après-Bouteflika, contraint à la démission par le mouvement populaire de contestation du Hirak, en avril 2019.