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Libération
Maghreb

L’Algérie accuse le Maroc d’un «bombardement barbare» au Sahara-Occidental

Trois transporteurs algériens ont été tués dans l’explosion de leurs véhicules, lundi, sur une piste du Sahara-Occidental.
Des membres de la guérilla du Front Polisario, au Sahara-Occidental, en mars 2016. (Farouk Batiche/AFP)
publié le 4 novembre 2021 à 18h38

Trois morts ont surgi dans cette guerre invisible. Lundi deux camions de transport algériens ont été touchés par une explosion alors qu’ils se trouvaient au Sahara-Occidental, disputé par le Maroc et la guérilla du Front Polisario. L’incident a eu lieu sur la maigre bande de territoire contrôlée par les indépendantistes, à proximité de la localité de Bir Lahlou, selon le site algérien Menadefense, qui affirme avoir repéré des «traces de brûlure au sol» sur des images satellites. Ce bout de désert rocailleux, très peu peuplé, a en grande partie été évacué de sa population civile depuis la reprise officielle des hostilités, il y a tout juste un an. Mais une piste reliant Nouakchott, en Mauritanie, à Tindouf, en Algérie, et traversant le Sahara-Occidental sur 140 kilomètres reste empruntée par les transporteurs routiers.

Selon Menadefense, les véhicules, «deux camions MAN immatriculés à Ouargla [en Algérie]», revenaient à vide d’une «opération d’exportation de ciment blanc vers la Mauritanie». Ils étaient stationnés à quelques dizaines de mètres de la piste quand la déflagration est survenue, en milieu de journée. «L’opération d’exportation légale est passée par les douanes algériennes et mauritaniennes, précise le site spécialisé. La société de transport assurait fréquemment des livraisons en Mauritanie et au Niger en plus de desservir le grand Sud algérien.» Les trois chauffeurs algériens ont été tués dans l’explosion.

Qui est à l’origine du bombardement ? Les camions se trouvaient à une trentaine de kilomètres du mur de défense marocain et de ses batteries d’artillerie. Difficile d’imaginer un tir de précision à cette distance. Ce tronçon de piste, régulièrement emprunté par des véhicules, n’est pas réputé miné. Le Front Polisario évoque plutôt l’hypothèse d’une frappe de drone. «Plusieurs facteurs désignent les forces d’occupation marocaines au Sahara occidental comme ayant commis, avec un armement sophistiqué, ce lâche assassinat», a indiqué la présidence de la République algérienne dans un communiqué publié mercredi. La mission des Nations unies au Sahara-Occidental (Minurso) a lancé une enquête.

Entre Alger, parrain historique des indépendantistes saharaouis, et Rabat, la tension est au plus haut. L’Algérie a rompu ses relations diplomatiques avec son voisin, fin août. Elle a cette fois explicitement menacé le Maroc de représailles. «Leur assassinat ne restera pas impuni», a prévenu la présidence algérienne dans le même communiqué, en rendant hommage aux «trois victimes innocentes de cet acte de terrorisme d’Etat». Rabat, de son côté, n’avait pas encore réagi officiellement jeudi soir.

Jusqu’à présent, le Maroc avait tout fait pour minimiser la reprise de la guerre avec le Front Polisario, après trente ans de cessez-le-feu. La guérilla indépendantiste saharaouie, qui exige depuis des décennies l’organisation du référendum d’autodétermination prévu par les Nations unies, ne dispose pas actuellement de moyens militaires suffisants pour inquiéter les forces de défense marocaines. L’implication de l’Algérie, même indirecte, changerait évidemment la donne. Au risque d’une dangereuse escalade.