C’est une mesure rare. Le maire d’Orléans a pris ce mardi 26 août un arrêté pour interdire l’inhumation de Protais Zigiranyirazo, dit «Monsieur Z», considéré comme l’une des principales figures du génocide des Tutsis au Rwanda, dont les obsèques sont prévues le 28 août dans sa commune. Mort le 3 août à Niamey (Niger) à 87 ans, Protais Zigiranyirazo avait été condamné à vingt ans de prison pour génocide en première instance par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) mais acquitté en appel en 2009. Les juges de la chambre d’appel avaient à l’époque conclu que leurs collègues de première instance s’étaient «gravement fourvoyés dans le traitement des preuves» et qu’il n’y avait pas d’autre choix que l’acquittement.
Cerveau du génocide
Frère aîné de la veuve du président rwandais Juvénal Habyarimana dont le meurtre, le 6 avril 1994, avait été immédiatement suivi par le début du génocide, «Monsieur Z» reste considéré par beaucoup comme l’un des cerveaux du cercle présidentiel hutu soupçonné d’avoir planifié le génocide. C’est le cas du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), association française de rescapés du génocide et de leurs soutiens, qui a appelé le gouvernement français et les élus d’Orléans à s’opposer à l’inhumation de Protais Zigiranyirazo.
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«Pourquoi le gouvernement français a-t-il accepté qu’il bénéficie d’obsèques à grand spectacle le 28 août en l’église Saint-Paterne d’Orléans et d’une inhumation au Grand Cimetière d’Orléans après avoir, avec constance, refusé de l’accueillir de son vivant ?» s’interroge le CPCR dans un communiqué. Le maire d’Orléans, Serge Grouard (Divers droites), a à son tour estimé ce mardi dans un communiqué que cette «inhumation sur le territoire communal […] apparaît incompréhensible au regard de la gravité des faits qui lui sont reprochés» et «constitue une offense insoutenable à la mémoire des disparus».
«Troubles à l’ordre public»
Le maire a pris un arrêté d’interdiction en raison d’un «risque grave de troubles à l’ordre public» et de «la possibilité sérieuse que la sépulture devienne un lieu de glorification pour les auteurs et complices du génocide rwandais». Selon Serge Grouard, près de 400 personnes, issues de l’entourage du défunt, pourraient assister aux obsèques et il «s’oppose expressément à l’inhumation de l’intéressé dans le grand cimetière d’Orléans». L’entourage de «Monsieur Z» a été prévenu de l’arrêté d’interdiction et peut faire appel, a précisé la municipalité à l’AFP.
D’avril à juillet 1994, le génocide au Rwanda a fait selon l’ONU 800 000 morts, membres de la minorité tutsie ou Hutus modérés, tués par les Forces armées rwandaises et les milices extrémistes hutu Interahamwe.