Le Niger, le Mali et le Burkina Faso font un pas de plus dans la même direction. Ils ont annoncé mercredi 6 mars la création d’une force militaire conjointe pour lutter contre les insurgés jihadistes qui grignotent leurs territoires depuis des années. Les trois pays, qui ont en commun d’être dirigés par des officiers putschistes, avaient déjà formalisé leur rapprochement en fondant Alliance des Etats du Sahel (AES), à l’automne dernier.
«Mettre en déroute ces forces du mal»
Leurs chefs d’état-major des armées se sont réunis à Niamey mercredi 6 mars. Cette «force conjointe des pays de l’AES sera opérationnelle dans les plus brefs délais pour prendre en compte les défis sécuritaires dans notre espace», a indiqué le général Moussa Salaou Barmou, chef d’état-major nigérien des armées, dans un communiqué publié à l’issue de leur rencontre, sans préciser les contours ni les effectifs du nouveau dispositif. «Nous sommes convaincus qu’avec les efforts conjugués de nos trois pays, nous parviendrons à créer les conditions d’une sécurité partagée», a-t-il ajouté.
Le même jour, une position de l’armée malienne à Labbezanga, à la frontière du Niger, a été attaquée. Vraisemblablement par les hommes de l’Etat islamique au Grand Sahara (EIGS) qui contrôlent la zone. L’assaut a été repoussé, affirme Bamako. «La riposte des Forces armées maliennes, en combinaison avec les appuis aérien et terrestre des Forces armées nigériennes, a permis de mettre en déroute ces forces du mal», a commenté le colonel-major Souleymane Dembélé, porte-parole de l’armée malienne, qui y voit un «exemple poignant» de la «combinaison des efforts des deux armées».
Les trois pays de l’AES, anciennes colonies françaises, ont tourné le dos à Paris et se sont rapprochés économiquement et militairement de nouveaux partenaires, dont la Russie. Au Mali et au Burkina Faso, la présence de mercenaires du groupe Wagner, remplacé par une nouvelle structure mieux contrôlée par Moscou, Africa Corps, a déjà été documentée. Quelques mois avant leur arrivée, les soldats français de l’opération Barkhane ont été poussés dehors. L’ancienne force conjointe du G5 Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger, Mauritanie, Tchad), soutenue à bout de bras par Paris, a totalement cessé d’opérer après le retrait des membres de l’AES, sans jamais avoir véritablement répondu aux défis sécuritaires de la région.
Levée des sanctions de la Cédéao
Fin janvier, Bamako, Niamey et Ouagadougou ont également annoncé qu’ils quittaient la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) «sans délai» – alors que les textes de l’organisation prévoient un processus de sortie d’une durée d’un an. Leurs dirigeants, le général Abdourahamane Tiani (Niger), le colonel Assimi Goïta (Mali) et le capitaine Ibrahim Traoré (Burkina), ont accusé à plusieurs reprises cette organisation d’être inféodée à la France. Ils lui ont également reproché de ne pas les avoir soutenus dans la lutte qu’ils mènent contre les groupes jihadistes affiliés à Al Qaeda et à l’Etat islamique qui les frappent régulièrement, provoquant des milliers de morts et des millions de déplacés.
La Cédéao a récemment tendu la main aux trois régimes militaires, appelant début février à la «réconciliation». Le 24 février, elle a levé les lourdes sanctions qu’elle avait imposées au Niger pour obtenir la libération du Président renversé Mohamed Bazoum et son rétablissement dans ses fonctions après avoir renoncé à le faire par la force. Les trois régimes ont répondu que leur décision de retrait de la Cédéao était «irréversible».