«A 11 heures, il y a eu l’échange. L’échange, c’est nous. C’est un commerce qu’ils ont avec les Libyens… C’est la vente d’êtres humains, le trafic de nègres… C’est dommage.» L.A (1), un Camerounais de 26 ans, se cachait dans les oliveraies près de Sfax, une ville portuaire à l’est de la Tunisie, lorsqu’il a été arrêté le 17 octobre 2023 par les forces de sécurité tunisiennes. «La police a commencé à détruire les endroits où les Noirs dormaient et à poursuivre les gens. Nous étions nombreux, de toutes nationalités : Camerounais, Soudanais, Guinéens, Ivoiriens… beaucoup de femmes, beaucoup d’enfants. C’est là que tout a commencé.»
Ce témoignage figure dans un rapport accablant présenté le 29 janvier au Parlement européen par un collectif de chercheurs internationaux opérant sous le pseudonyme «RRX». Le document révèle l’implication directe des forces policières et militaires tunisiennes dans la vente de migrants subsahariens à la frontière libyenne. Fondé sur des entretiens avec 30 migrants subsahariens expulsés de Tunisie vers la Libye entre juin 2023 et novembre 2024, le rapport expose une chaîne logistique bien rodée : arrestation, transport vers la frontière, détention par des autorités tunisiennes, ven