Son regard est profond mais fuyant, ses sourires sont rares et ses réponses succinctes. Assise à l’ombre d’une modeste boutique de tôle de la ville de Maikona, aux portes du désert de Chalbi, Atho Jillo raconte comment sa vie a pris un nouveau tournant ces dernières années. En 2020, alors qu’il ne lui reste qu’un an d’école secondaire à suivre pour obtenir l’équivalent du bac, elle doit abandonner contre son gré. «Mes parents ne pouvaient plus payer les frais de scolarité. Tous les chameaux sont morts de la sécheresse.» Elle a alors 17 ans, et quatre mois après son décrochage, elle se marie sur décision familiale.
En plus des graines de café, des feuilles de thé, des vêtements et de la petite somme d’argent que le fiancé a versé à sa belle-famille pour les fiançailles, il a fourni trois chameaux, dont le prix avoisine les 330 euros aujourd’hui, pour obtenir la main d’Atho. «L’un d’entre eux est mort, mais ça a quand même aidé ma famille à survivre», se souvient-elle. Lorsque nous la rencontrons fin juillet, elle n’a pas de travail et est enceinte de huit mois. Un voile aux teintes beige, jaune, ocre et bleu sur les épaules, elle se pince les lèvres. «Je ne suis pas heureuse de ne pas avoir fini ma scolarité, mais notre famille est nombreuse alors je laisse mes frères et sœurs plus jeunes aller à l’école.»*
Interview
Ici dans le nord du Kenya, et plus précisément dans le comté de Marsabit, de nombreuses jeunes filles se voient forcées de quitter l’école, par manque d