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Maroc : qui est la mystérieuse princesse Lalla Salma, ex-épouse de Mohammed VI, qui vient de réapparaître en Grèce ?

L’ex-femme du roi a été aperçue à Mykonos après des années d’absence. Surnommée la «princesse fantôme» en raison de sa disparition de l’espace public, la Marocaine de 46 ans reste très proche de son fils, le prince héritier Moulay el-Hassan.

La princesse Lalla Salma du Maroc à Amsterdam, au Pays-Bas, le 1er mai 2013. (Michel Porro/Getty Images)
Publié le 23/07/2024 à 7h58

Les rumeurs les plus folles la disaient emprisonnée, séquestrée, voire assassinée. Cinq ans après sa dernière apparition publique, la mystérieuse princesse Lalla Salma, l’ex-épouse du roi marocain Mohammed VI, a finalement été aperçue, début juillet, sur l’île grecque de Mykonos. Des vidéos publiées par la presse locale montrent la femme à l’abondante chevelure rousse accompagnée de ses deux enfants – le prince héritier Moulay el-Hassan (21 ans) et la princesse Lalla Khadija (17 ans) – en train de se balader en tenue décontractée dans la station balnéaire.

Les trois membres de la famille royale ont voyagé jusqu’en Grèce dans un avion de ligne, accompagnés d’un impressionnant dispositif d’escorte : pas moins de 70 personnes (personnels de sécurité, majordomes, cuisiniers, etc.), selon les médias grecs. Une dizaine de véhicules luxueux auraient été nécessaires pour transporter leurs bagages jusqu’à leur résidence, où ils passeront une partie de leurs vacances.

Admirée par les Marocains

Ces dernières années, Lalla Salma avait quasiment disparu des radars. Les derniers clichés d’elle remontent à 2019, alors qu’elle faisait du shopping dans les rues de Manhattan. La princesse n’avait alors plus donné de signe de vie durant deux longues années, à l’exception d’une visite inattendue dans un service oncologique d’un hôpital marocain, en tant que présidente d’une fondation pour la prévention et le traitement contre le cancer. A 46 ans, la Marocaine a pourtant longtemps été sur le devant de la scène médiatique, n’ayant jamais voulu s’enfermer dans le rôle d’épouse silencieuse. Née à Fès en 1978 d’une famille issue de la classe moyenne, celle qui est née sous le nom de Salma Bennani est diplômée d’un diplôme d’Etat d’ingénieur en génie informatique dans une prestigieuse université de Rabat. Ses enseignants ont souvent décrit une élève remarquablement intelligente.

La rencontre entre cette fille d’un professeur de mathématiques et Mohammed VI aurait eu lieu lors d’une soirée dans la capitale marocaine, quelques mois avant la mort de l’ancien roi Hassan II. Elle a alors 21 ans. Mohammed VI, quinze de plus. Leur mariage, en 2002, bouleverse la tradition monarchique alaouite. Lalla Salma devient la première conjointe d’un roi marocain à disposer du titre d’altesse royale et de princesse, jusque-là réservé aux enfants, aux sœurs et aux frères du monarque. La discrète fille du peuple devient l’ambassadrice d’un Maroc moderne, admirée par une partie de la population pour son charisme, son élégance et son indépendance.

«Lalla Salma a fait l’objet d’une forme de communication politique, explique Omar Brouksy, journaliste et auteur de l’ouvrage Mohammed VI, derrière les masques (Nouveau Monde, 2014). En lui accordant le statut princier, le roi a voulu prouver à l’opinion publique internationale qu’il souhaitait rompre avec le passé de son père, que ce soit sur le plan protocolaire ou politique.» Une manière, aussi, de réconcilier le Maroc avec ses femmes, alors que les débats autour d’une réforme du code de la famille (Moudawana) battent leur plein.

Un rôle déterminant sur l’avenir de la monarchie

La princesse bénéficie très vite d’un quasi-rôle de première dame à l’occidentale, apparaissant de plus en plus souvent aux côtés de son mari. Elle le représente parfois à l’étranger, et rencontre des dirigeants du monde entier. Elle participe en 2011 aux noces royales du prince William et de Kate Middleton à Londres, ou reçoit le couple Sarkozy, à titre privé, à la résidence royale. Elle préside, en décembre 2017, une cérémonie d’hommage à Rabat à la mémoire de l’artiste Mohamed Amine Demnati, avant de disparaître totalement de l’espace public.

Son absence sur un cliché daté de février 2018, sur lequel Mohammed VI, entouré de sa famille, est allongé sur un lit d’hôpital après une opération du cœur, alimente les premières spéculations autour d’une crise au sein du couple. Un mois plus tard, le magazine espagnol ¡ Hola ! annonce que le divorce serait effectif. Une campagne de presse orchestrée par les médias proches des services de renseignements marocains dépeint tout à coup une Lalla Salma «dédaigneuse» et «méprisante», qui s’efforcerait d’afficher une «bien fausse cool attitude». Dans un communiqué publié en 2019, l’avocat français du roi Mohammed VI, Eric Dupond-Moretti, met fin aux rumeurs en désignant la princesse par le terme d’«ex-épouse». Le Palais ne commentera jamais cette information.

Depuis, Lalla Salma vit dans l’ombre, ce qui ne l’empêche pas de conserver un rôle déterminant sur l’avenir de la monarchie. Le prince héritier Moulay el-Hassan, le premier en ligne de succession dans la dynastie alaouite qui gouverne le royaume, reste particulièrement attaché à sa mère. Après avoir obtenu son baccalauréat, le fils de Mohammed VI a même refusé de poursuivre ses études à l’université de Ben Guerir, près de Marrakech, pour rester à Rabat près de la princesse, avec qui il a vécu la plus grande partie de sa vie. Une relation fusionnelle qui offre à Lalla Salma une certaine «protection», poursuit Omar Brouksy, mais qui suscite la méfiance de la famille royale, en particulier des sœurs du roi. Si Mohammed VI venait à abdiquer, une trop grande influence de Lalla Salma sur son fils pourrait même conduire, selon le journaliste, à une «petite révolution de palais».