«Maman, tu te souviens quand je me suis brûlé ?» demande en criant Seifeddine Jablaoui à sa mère, qui prépare à manger dans la cuisine. Contrairement à lui, Fadhila ne peut pas oublier cette date fatidique : le 20 mars 2020, son fils de 27 ans s’est immolé à quelques mètres de leur domicile à Haffouz, dans le gouvernorat de Kairouan, au centre de la Tunisie. Le jour où elle lui avait apporté de l’essence, lorsque sa moto est tombée en panne sèche.
«J’étais en dépression, je ne l’avais pas prémédité, mais j’ai essayé de me tuer avec ce que j’ai trouvé à la maison», se rappelle le jeune homme en fumant compulsivement avec les deux seuls doigts qui lui restent. Ses mains sont marquées par les brûlures, tout comme son visage, et il souffre de pertes de mémoire.
Dénoncer le harcèlement policier
Etudiant en cinéma, Seifeddine Jablaoui avait été arrêté à plusieurs reprises par la police, qui voulait faire de lui un informateur. Son refus lui a valu un harcèlement qui, assure-t-il, dure toujours et vise sa famille. «Notre système est pourri et quand tu es contre lui, tu en paies le prix», regrette celui dont le prix à payer est de ne pas avoir droit à un passeport ni à une carte d’identité depuis des années.