Elles sont là depuis l’aube, assises à même le sol sur un morceau de carton recouvert d’une couverture bleue, adossées à un mur de l’hôpital public Moulay-Youssef de Rabat. Depuis six heures du matin, Chaïma et Aïcha n’attendent plus un miracle, mais seulement un signe, une nouvelle, un mot sur l’état de santé de Mohammed, le frère de l’une et l’époux de l’autre.
Atteint de la maladie d’Alzheimer, l’homme, âgé d’une soixantaine d’années, est hospitalisé depuis huit jours pour une hypoxie cérébrale – un manque d’apport d’oxygène au cerveau. «Si tu connais quelqu’un qui travaille à l’hôpital, tu entres. Si tu payes, on te parle. Sinon, tu restes dehors», lâche Chaïma, la voix serrée sous son foulard violet. Pour soigner son mari, elle dit avoir tout payé : le matelas, l’oxygène, la perfusion. «Une infirmière nous a dit qu’il allait mourir, qu’on ferait mieux de le reprendre. Ici, même la dignité a un prix.»
Le Maroc a été secoué, fin septembre et début octobre, par des manifestations organisées par le collectif «GenZ 212», mobilisant des milliers de jeunes nés entre le début des années 1990 et 2010, descendus dans