Le camion de Hocine (1) est immobilisé. Avant, il était transporteur indépendant, mais aujourd’hui «rien ne se passe ici, alors personne ne m’appelle», sourit malgré tout le quadragénaire. La remorque bleue est garée au bout de la petite commune d’Ait Taleb, derrière l’école, à quelques pas de son ancienne maison totalement détruite. Il y a un mois, le 8 septembre, un séisme d’une magnitude 6,8, le plus puissant de l’histoire du Maroc, a frappé une partie du sud du pays, entre Marrakech et Agadir, faisant presque 3 000 morts, plus de 5 000 blessés et laissant des centaines de milliers de personnes sans logement.
Reportage
Le véhicule est devenu multi-usage : faire de l’ombre, accrocher des câbles tendus pour la toile blanche – nouveau plafond du salon d’appoint –, ou servir d’étagère pour la petite radio. Celle-ci a été installée sous le châssis, sur le caisson de rangement du matériel d’entretien. L’antenne est dépliée au maximum, prolongée par un fil de cuivre pour mieux capter. «Ecouter la radio, ça me change les idées, ça me permet de rire, de penser à autre chose», commente Hocine. Deux gros blocs de polystyrène font office de divan, un fin tapis tressé bicolore est jeté sur le sol, de légers matelas éventrés et quelques coussins rendent le tout plus confortable. Une tente jaune fournie par l’Etat marocain est placée de l’autre côté de cette pièce de vie précaire. Elle a servi de chambre à coucher pour toute la famille, mais Hocine est le seul à y dormir maintenant.
«Faut-il en rire ou en pleurer ?»
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