Menu
Libération
Reportage

Pour les Soudanaises, «il faut poursuivre l’élan qui s’est créé»

Article réservé aux abonnés
Presque deux ans après la chute du régime islamo-militaire d’Omar el-Béchir, les femmes, en première ligne de la révolte, oscillent entre fierté et déception. Beaucoup reste encore à faire pour les intégrer dans la société.
«Les femmes, au Soudan, s’organisent et sont présentes depuis longtemps dans les mouvements sociaux», constate Reem Abbas, journaliste et activiste soudanaise. (Byron Smith/Libération)
par Patricia Huon, Envoyée spéciale à Khartoum et photos Byron Smith
publié le 19 février 2021 à 6h43

Les révolutions ont besoin d’icônes. Au Soudan, ce fut une jeune femme vêtue de blanc, juchée sur le toit d’une voiture, d’où elle haranguait la foule de manifestants avec les chants de ralliement de la révolte, et dont la photo fit le tour du monde. Conscientes qu’elles avaient encore plus à gagner, ou à perdre, que leurs homologues masculins dans ce combat, des centaines de milliers de femmes, de tous les âges et classes sociales, ont pris part aux manifestations qui, après un coup d’Etat militaire, ont mené à la chute du dictateur Omar el-Béchir, le 11 avril 2019. Sur les réseaux sociaux, puis dans les rues de Khartoum, la capitale, elles ont été surnommées kandakas, le titre donné il y a des millénaires aux reines et princesses du royaume nubien de Kush, dont les pyramides sont toujours visibles à environ 200 kilomètres au nord de Khartoum.

«Les femmes, au Soudan, s’organisent et sont présentes depuis longtemps dans les mouvements sociaux, constate Reem Abbas, journaliste et activiste soudanaise. Lors du sit-in [le rassemblement populaire massif, réclamant la destitution de l’autocrate, devant le quartier général de l’armée, ndlr], elles ont trouvé un espace d’expression, où elles sentaient qu’elles pouvaient faire entendre leur voix et défier publiquement les normes patriarcales de