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Darfour

Soudan : à El-Fasher assiégé depuis un an, l’offensive sans merci des paramilitaires

Les Forces de soutien rapide du général Hemetti redoublent leurs assauts sur la grande ville du Darfour du Nord et sur les camps de déplacés qui l’entourent.
Le 24 avril 2025, à Port-Soudan, lors d'un rassemblement organisé par le Front populaire pour la libération et la justice du Soudan pour dénoncer le siège imposé par les Forces de soutien rapide (FSR) sur la ville d'El-Fasher. (AFP)
publié le 1er mai 2025 à 17h51

Le siège dure depuis maintenant un an. Les Forces de soutien rapide (RSF), une unité paramilitaire dissidente dirigée par le général Hemetti, encerclent El-Fasher, la seule grande ville du Darfour à échapper à leur contrôle. Ils lancent régulièrement des assauts en direction de la cité, défendue par la sixième division de l’armée régulière et surtout ses alliés de la Force conjointe, composée d’anciens combattants rebelles du Darfour.

Les offensives des RSF ont jusque-là été repoussées. Mais les paramilitaires, chassés de Khartoum et de l’Etat agricole de la Jézira, au sud de la capitale, en début d’année, redoublent désormais d’ardeur pour s’emparer d’El-Fasher. Ils n’hésitent plus à bombarder et à attaquer les camps de déplacés qui se trouvent à proximité de la ville, comme celui de Zamzam, le 11 avril, ou celui d’Abou Shouk, quelques jours plus tard. Leurs assauts ont fait des centaines de morts et poussé des dizaines de milliers de personnes sur les routes.

«Horreur sans limite»

Le 1er mai, le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a indiqué qu’au moins 542 civils ont été tués depuis trois semaines au Darfour-Nord. «Le bilan réel est sans doute beaucoup plus élevé, a-t-il précisé. L’horreur de ce qui se passe au Soudan est sans limite.» Les Forces de soutien rapide ont ouvertement prévenu qu’un «bain de sang» attendait la ville d’El-Fasher.

«Les RSF tuent systématiquement tous les hommes en âge de combattre qui ne sont pas arabes», raconte Mohammed Sadam, un Darfouri réfugié en France dont la famille a fui le camp de Zamzam la semaine dernière. Il appartient à la communauté zaghawa, comme la plupart des combattants de la Force conjointe. «Nous nous battons pour notre survie. Si les RSF prennent El-Fasher, ils vont nettoyer la ville comme à El-Geneina [où les paramilitaires ont tué entre 10 000 et 15 000 membres de la communauté masalit en juin puis novembre 2023]», assure-t-il.

Bombardements indiscriminés

Depuis un an, la Force conjointe, commandée par l’ex-chef rebelle Minni Minnawi, aujourd’hui gouverneur du Darfour, «a joué un rôle crucial en permettant aux Forces armées soudanaises [l’armée régulière] de tenir El-Fasher, en lançant diverses manœuvres pour perturber les voies de ravitaillement des RSF», détaille une note de l’ONG Armed Conflict Location and Event Data (Acled) publiée le 15 avril : «Ces opérations ont infligé des pertes considérables au RSF, l’obligeant à déployer des milliers de soldats pour renforcer ses lignes de front à El Fasher, affaiblissant encore sa capacité à garder le contrôle sur d’autres fronts de bataille.»

Les RSF s’acharnent cependant, intensifiant leurs bombardements indiscriminés sur la capitale historique du sultanat du Darfour et sur les camps surpeuplés qui l’entourent - celui de Zamzam seul comptait près d’un million de déplacés. Le 24 avril, les hommes de Hemetti ont de nouveau lancé deux attaques sur El-Fasher, l’une depuis le sud au cours de l’après-midi, l’autre à la nuit tombée depuis le nord de la ville. L’armée affirme que 700 paramilitaires, à bord d’une soixantaine de véhicules, ont participé à l’offensive. Parmi eux, 70 auraient été tués, et 30 blessés.