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Tensions

Tchad : une bande de «pieds nickelés» attaque le palais présidentiel avant d’être «éradiquée», selon les autorités

Un commando de 24 hommes a tenté de prendre d’assaut le palais présidentiel tchadien, mercredi 8 janvier, avant d’être décimé, selon le pouvoir en place, qui évoque une opération menée par une bande de «pieds nickelés».
Des soldats tchadiens à N'Djamena, le 8 janvier 2024. (Joris Blomey/AFP)
publié le 8 janvier 2025 à 22h10
(mis à jour le 9 janvier 2025 à 7h27)

Voies menant vers le palais présidentiel bouclées, chars de sortie, policiers en armes postés aux angles des rues… La situation au Tchad s’est particulièrement tendue ce mercredi 8 janvier au soir, après qu’un mystérieux commando a attaqué mercredi soir le palais présidentiel tchadien à N’Djamena et fait au moins un mort avant d’être décimé, avec 18 de ses 24 membres tués, et les six autres blessés, selon le gouvernement qui a évoqué une attaque de «pied nickelés» drogués et alcoolisés. Un mort et trois blessés sont à signaler chez les gardes présidentiels.

Du côté du pouvoir, c’est peu dire qu’on n’a pas semblé céder à la panique. «La situation est totalement maîtrisée. […] Toute cette tentative de déstabilisation a été éradiquée», a déclaré Abderaman Koulamallah, porte parole du gouvernement tchadien et ministre des Affaires étrangères, dans une vidéo publiée dans la soirée sur Facebook. «Toute cette tentative de déstabilisation a été anéantie.» «C’était un petit incident… tout est calme», avait-il tempéré plus tôt. «Rien de grave, pas de panique, la situation est sous contrôle», avait tempéré plus tôt dans un message sur le même réseau le ministre tchadien des Infrastructures, Aziz Mahamat Saleh.

«Très facilement maîtrisés»

Interrogé ensuite sur la télévision nationale, le ministre a estimé que l’attaque n’était «probablement pas terroriste», alors que des rumeurs insistantes évoquaient une possible attaque des jihadistes de Boko Haram, et qu’elle avait été menée par un «ramassis de pieds nickelés» drogués et alcoolisés venus en civil d’un quartier pauvre du sud de la ville avec «des armes, des coupe-coupes [machettes, ndlr] et des couteaux».

Débarqués d’un camion-remorque devant le palais présidentiel, «ils ont poignardé les quatre gardes présents». Parmi les blessés, deux sont dans un état grave, a indiqué le ministre. Les assaillants ont ensuite pénétré dans la présidence, puis un autre garde a tiré pour donner l’alerte et «ils ont été très facilement maîtrisés», a-t-il ajouté. Selon lui, ils avaient avec eux de petites bouteilles «remplies d’alcool» de type whisky, et les six survivants sont «complètement drogués».

Alors que certaines sources sécuritaires avaient parlé dans un premier temps d’un commando lourdement armé, le ministre a souligné que les assaillants n’avaient en fait «aucune arme de guerre» avec eux. Au final, c’est une attaque «complètement désespérée», «assez incompréhensible» et sans motif «sérieux», a-t-il déclaré, en soulignant, pour rassurer la population de ce pays à l’histoire jalonnée de coups d’Etat et d’attaques rebelles, qu’«aucune menace ne pèse actuellement sur le pays» et ses institutions.

Ces tirs ont eu lieu quelques heures après la visite à N’Djamena du ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, qui a eu plusieurs entretiens avec des dirigeants tchadiens, dont un à la présidence avec le chef de l’Etat Mahamat Idriss Déby Itno, qui était au palais pendant la tentative.

Départ de l’armée française

Le Tchad avait annoncé par surprise fin novembre qu’il mettait fin à l’accord militaire avec la France, actant la fin de soixante ans de coopération militaire depuis la fin de la colonisation française. Selon le président Déby, ces accords étaient «complètement obsolètes», face «aux réalités politiques et géostratégiques de notre temps».

En mai dernier, se sont achevées à N’Djamena trois années de transition, avec l’élection de Mahamat Idriss Déby, porté au pouvoir par une junte militaire après la mort de son père Idriss Déby, tué par des rebelles au front en 2021. Menacé par des offensives rebelles, Déby père avait pu compter sur l’appui de l’armée française pour repousser celles-ci en 2008 puis en 2019.

Ces dernières semaines, le président tchadien a aussi plusieurs fois menacé de quitter la force multinationale mixte (FMM) formée en 1994 avec le Cameroun, le Niger et le Nigeria pour sécuriser la région du lac Tchad, en dénonçant la passivité de ses alliés. La FMM est au départ une force de lutte contre la criminalité transfrontalière principalement, mais son mandat a ensuite été élargi pour inclure la lutte contre les jihadistes, dont les campagnes armées se sont étendues de leur base nigériane aux trois pays voisins.

Les soldats tchadiens sont fréquemment visés par les attaques des jihadistes de Boko Haram dans la région du lac Tchad. Fin octobre, une attaque de Boko Haram contre une base militaire tchadienne de cette région a fait quinze morts parmi les officiers, selon les autorités tchadiennes. En riposte, le président Déby a «personnellement» lancé une opération baptisée «Haskanite», qu’il a dirigée depuis la province du lac Tchad pendant deux semaines début novembre.

Mise à jour à 7h27 avec davantage de détails sur l’attaque.