Ballerines noires et marchant d’un pas pressé, Dieneba Sarr file le long des coursives du lycée de Thiaroye, dans la banlieue de Dakar. Passe une tête dans les salles de classe, toutes occupées. Jusqu’au numéro A6, où une quinzaine d’élèves cassent tranquillement la croûte. «Prêtez-nous la salle !», intime la prof de français. Ils remballent sandwichs et sodas en traînant les pieds. Il est 12h15, plus que 45 minutes de pause. Ce précieux temps libre, Dieneba Sarr l’emploie à «une initiative tout à fait personnelle» : aborder avec ses élèves le massacre de Thiaroye, survenu le 1er décembre 1944.
Ce jour-là, le haut commandement français ordonnait d’ouvrir le feu sur des soldats africains ayant combattu sous le drapeau français – des «tirailleurs sénégalais». En voie de démobilisation et de rapatriement, ces hommes, débarqués à Dakar le 21 novembre 1944 et postés au camp de Thiaroye, réclamaient leur dû : les arriérés de soldes et de primes qu’ils avaient gagnées. Dans un courrier adressé cette semaine à son homologue sénégalais Bassirou Diomaye Faye, le président Emmanuel Macron a reconnu un «massacre». Une première, 80 ans après les faits. Dakar, de son cô