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Chamboule-tout

Tunisie : à un mois de la présidentielle, Kaïs Saïed procède à un vaste remaniement ministériel

Le président tunisien a décidé de remplacer 19 ministres ce dimanche 25 août, sans fournir d’explications officielles. Début août, il avait déjà remercié son Premier ministre, Ahmed Hachani.
Le président tunisien Kaïs Saïed à Pékin, le 31 mai. (Tingshu Wang/Reuters)
publié le 25 août 2024 à 21h04

Pour la énième fois, Kaïs Saïed se débarrasse de membres de son gouvernement, sans aucune justification officielle. Le président tunisien, au pouvoir depuis 2019, a procédé ce dimanche 25 août à un vaste remaniement ministériel, à un peu plus d’un mois de l’élection présidentielle prévue le 6 octobre. Une décision surprise qui comprend le remplacement de 19 ministres – dont ceux des Affaires étrangères et de la Défense – et de trois secrétaires d’Etat. Le 8 août, les services du président avaient déjà annoncé sans aucune explication le limogeage du Premier ministre, Ahmed Hachani, qui n’a pas été remplacé depuis.

Parmi les nouveaux nommés : Mohamed Ali Nafti, un ancien diplomate ayant exercé dans plusieurs ambassades tunisiennes et qui devient le nouveau chef de la diplomatie. Il occupait le poste de secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères lorsque Kaïs Saïed l’avait démis de ses fonctions en 2021. Khaled Shili, également ex-diplomate et ancien responsable au ministère des Affaires étrangères, devient quant à lui ministre de la Défense. Selon la présidence, les trois nouveaux secrétaires d’Etat assisteront le ministre des Affaires étrangères, le ministre de l’Agriculture et des ressources hydrauliques et celui de l’Emploi.

Des candidats empêchés de se présenter

Elu démocratiquement il y a cinq ans, Kaïs Saïed s’est octroyé les pleins pouvoirs lors d’un coup de force en juillet 2021, limogeant son Premier ministre de l’époque et suspendant le Parlement, par la suite dissous. Accusé de dérive autoritaire par l’opposition et ses détracteurs, il brigue aujourd’hui un second mandat présidentiel, dans le cadre de ce qu’il a qualifié de «guerre de libération et d’autodétermination» visant à «établir une nouvelle république». Face à lui lors de cette élection, deux autres candidats : Zouhair Maghzaoui, un ex-député de la gauche panarabe, et un industriel quadragénaire, Ayachi Zammel, chef d’un parti libéral.

Pour autant, le scrutin s’annonce loin d’être démocratique. Dans un communiqué publié le 20 août, Human Rights Watch (HRW) dénonce un contexte de «répression croissante» à l’approche de l’élection. L’ONG assure notamment qu’«au moins huit candidats potentiels ont été poursuivis en justice, condamnés ou emprisonnés» et, de facto, «ont été empêchés de se présenter» à l’élection présidentielle. Il s’agit entre autres des dirigeants de l’opposition Issam Chebbi et Ghazi Chaouachi, et de la cheffe du Parti destourien libre, Abir Moussi.

«Après avoir emprisonné des dizaines d’opposants et de militants de renom, les autorités ont écarté presque tous les concurrents sérieux de la course à la présidence, réduisant cette élection à une simple formalité», a déclaré Bassam Khawaja, directeur adjoint de la division Moyen-Orient /Afrique du Nord pour HRW. Plusieurs candidats s’étaient notamment plaints d’avoir été entravés sur le plan administratif pour obtenir les formulaires de parrainages ainsi qu’un extrait de casier judiciaire.