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Droits humains

«Une situation intolérable» : Reporters sans Frontières exige la libération de quatre journalistes détenus en Erythrée depuis 24 ans

L’ONG appelle la communauté internationale à secourir ces prisonniers, détenus dans l’un des pays les plus fermés au monde. Ces quatre journalistes travaillaient dans des médias privés fermés par le pouvoir en 2001.

Un homme porte un tee-shirt à l'effigie du journaliste Dawitt Isaac, le 3 mai 2010, à Stockholm. (Olivier Morin/AFP)
Publié le 24/09/2025 à 15h19

Cela fait 24 ans qu’ils sont emprisonnés sans jamais avoir été jugés. L’ONG Reporters sans frontières (RSF) a demandé cette semaine la libération de quatre journalistes détenus en Erythrée, pays parmi les plus fermés au monde. L’association exhorte la communauté internationale à agir pour que soient délivrés les Erythréens Temesgen Ghebreyesus, Seyoum Tsehaye, Amanuel Asrat et Dawit Isaak (également de nationalité suédoise), qui «sont aujourd’hui les journalistes les plus longtemps emprisonnés au monde», selon un communiqué de RSF publié mardi soir.

Depuis l’indépendance de l’Erythrée, proclamée le 24 mai 1993 suite à la guerre d’émancipation qui l’oppose à l’Ethiopie, le pays est dirigé d’une main de fer par Issaias Afwerki, 79 ans. Aucune élection n’a été organisée en plus de trente ans. Le pays occupe la 180e et dernière place du classement de RSF en matière de liberté de la presse.

«Torture morale et psychologique»

En 2001, les autorités d’Asmara ferment les médias privés et mènent une violente répression de l’opposition politique. Certains journalistes meurent en détention. Les quatre cités par RSF n’ont aucun contact avec le monde extérieur, selon le communiqué. Le directeur du bureau Afrique subsaharienne de RSF, Sadibou Marong, dénonce une «situation intolérable qui s’apparente à une torture morale et psychologique entretenue par les autorités érythréennes». «Cette détention arbitraire, hors normes, ne peut plus durer», a-t-il ajouté, cité dans le communiqué.

En 2005, Dawit Isaak est libéré pendant deux jours par les autorités érythréennes, avant d’être de nouveau arrêté. «Depuis, aucun signe de vie», déplore RSF. Interrogé par l’AFP sur les conditions de détention de ces journalistes et des preuves de vie, le ministre érythréen de l’Information Yemane Ghebremeskel, n’a pas donné suite.

RSF demande «à la Suède et à la communauté internationale de tout mettre en œuvre pour faire cesser cette grave violation des droits de ces journalistes». Plusieurs plaintes pour crimes contre l’humanité ont été déposées par RSF auprès du parquet suédois contre le président de l’Érythrée, mais aucune enquête n’a été ouverte, selon l’ONG. Cette dernière accuse Stockholm de «faire la sourde oreille dans l’affaire Dawit Isaak».

De son côté, le parquet suédois déclare à l’AFP ne faire «aucun commentaire» sur les critiques de RSF. Il précise néanmoins que les plaintes n’ont pas donné suite en raison du manque de coopération des autorités érythréennes.

L’Erythrée avait été épinglée par l’ONU pour le traitement de ses dissidents qui disparaissent au goulag, et des civils enrôlés à vie dans l’armée ou contraints au travail forcé dans le cadre d’un service national assimilé à de l’esclavage.