Le paquebot de croisières MSC Armonia est arrivé samedi 6 avril à Messine, en Sicile, après avoir passé trois jours dans le port de Barcelone. L’escale était programmée pour une demi-journée, mais un événement inattendu a obligé les quelque 1 500 passagers à prolonger leur séjour en Catalogne.
Les douanes espagnoles ont en effet constaté que 69 voyageurs (dont 14 mineurs), tous de nationalité bolivienne, n’étaient pas détenteurs d’un visa Schengen. Leur pays est l’un des quatre en Amérique latine (avec l’Equateur, le Guyana et le Suriname) à ne pas être exempté de cette démarche. Les ressortissants des autres Etats de la région peuvent entrer en Europe avec un passeport en cours de validité.
Faux visas tamponnés sur le passeport
Les autorités espagnoles pensent être en présence d’un cas d’immigration clandestine, et ont reproché à la compagnie italienne MSC de ne pas avoir vérifié la validité des documents de voyage des passagers au départ du port de Santos, au Brésil, le 19 mars. La nécessité ou non d’un visa Schengen, suivant le pays d’origine, est pourtant clairement expliquée sur le site de MSC. L’espace Schengen rassemble 27 pays européens, dont 23 membres de l’UE.
Des membres des familles des voyageurs ont cependant donné une autre version dans la presse bolivienne. Selon eux, les passagers pensaient être en règle et ont été victimes d’une escroquerie. Ce que confirme en partie l’Association bolivienne des agents de voyages (Abavyt), qui a dénoncé l’existence de faux visas. «Nous constatons qu’il est courant qu’une personne, au lieu d’accomplir les démarches légales, tente d’obtenir un visa de façon rapide. Elle reçoit un faux tampon sur son passeport, ce qui entraîne de graves conséquences», a estimé le président de l’association dans le quotidien El Diario.
Citée par le journal, la fille d’une des passagères signale cependant que sa mère a pu débarquer en territoire espagnol lors des escales précédentes, à Tenerife dans les îles Canaries et à Malaga. Dans les deux cas, la supercherie semble ne pas avoir été détectée.
#mscarmonia Despite announcing we are going, the stevedores have attached more ropes and now driven off. They are the only people who can detach us from what’s. So we are still going nowhere. Police out in force.
— gingerbread (@gingerb71214461) April 4, 2024
L’ensemble des passagers a été confiné dans le bateau plusieurs heures mardi, le temps de compter le nombre de visas non conformes. Certains ont exprimé leur colère sur les réseaux sociaux. «Au moins le night-club est resté ouvert», s’est consolé l’un d’eux.
Rapatriement en avion
Les 69 Boliviens ont été rassemblés dans une zone de transit, après communication de l’interdiction d’entrer en Espagne. Les personnes refoulées ont pu, selon le gouvernement régional catalan, déposer, si elles le souhaitaient, des demandes d’asile, conformément à la loi. Sans grande chance de succès puisque la Bolivie n’est pas considérée comme un pays où les droits humains sont bafoués. Le groupe est hébergé dans un autre bateau de MSC, arrivé jeudi de Livourne, dans l’attente du rapatriement par avion, à une date inconnue. C’est la compagnie de croisières qui paiera les frais de retour.
Dans un communiqué envoyé à l’agence de presse EFE, l’Association de coopération Bolivie Espagne (Acobe) exprime sa solidarité avec les personnes refoulées et demande aux agences de voyages de Bolivie de «respecter scrupuleusement les normes internationales». L’Acobe, créée en Espagne en 2004, fait en outre le lien entre la croisière et la volonté de quitter le pays : «La migration est parfois l’unique option pour améliorer sa qualité de vie et son avenir», estime le collectif.
Le prix de la croisière, d’après le site de MSC, se situe entre 800 et plusieurs milliers d’euros hors taxes (en pension complète), selon la qualité de la cabine choisie. La compagnie devra verser des dédommagements aux passagers, en raison de l’annulation des escales prévue à Ajaccio, Dubrovnik et Corfou. De Messine, l’Armonia rejoindra directement Venise, dernière étape de la croisière. D’après CNN, quelque 300 Brésiliens ont souhaité être conduits par avion à Rome, le 5 avril, aux frais de MSC, d’où ils doivent repartir dans leur pays.