Tout un pays en état de grâce. Ou en état de choc. En tout cas pas dans son état normal. L’Argentine vit dans une bulle d’immense liesse collective depuis sa victoire, dimanche. «Je crois que je n’ai pas dormi depuis, aucune idée de l’heure qu’il est», s’esclaffe Miguel, barbier de 23 ans, un choripán (sandwich à la saucisse grillée) à la main. Il est 10 heures, le soleil austral tape fort et, comme des millions d’Argentins, Miguel est venu voir passer le bus de la Selección victorieuse en son triomphe romain. Lundi il n’est pas allé travailler : «De toute façon on a fermé la boutique, qui aurait l’idée saugrenue d’aller se faire couper les cheveux en un jour pareil !» Et ce mardi, le gouvernement a décrété un jour férié national pour le retour des héros.
Tout le long de l’avenue du 9-Juillet, la plus large au monde selon les Argentins, la foule est inextricable. A tel point qu’il paraît impossible qu’un véhicule, même chargé de champions élevés au rang de demi-dieux, puisse la traverser. Les visages sont extatiques, la foule chante, danse depuis des heures, les inconnus s’embrassent en une gigantesque communion. «J’ai voyagé dix-huit heures en car depuis mon village de Patagonie pour venir vivre cette grande fête, crie Paula, couturière de 57 ans, qui sue à gross