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Administration Trump : qui est Pete Hegseth, animateur télé de Fox News nommé à la Défense et accusé d’agression sexuelle ?

L’ancien militaire a été désigné par Donald Trump pour diriger le Pentagone, titanesque administration de l’armée américaine. Controversé et trop peu qualifié, l’homme de 44 ans enchaîne les polémiques, notamment à cause de ses positions ultraconservatrices.
L'ancien militaire de 44 ans Pete Hegseth, animateur télé de Fox News, le 29 novembre 2016 à New York. (Spencer Platt/AFP)
publié le 17 novembre 2024 à 15h45

Sur son torse, une croix de Jérusalem, un emblème des Croisades. Sur son biceps, l’inscription Deus vult, «Dieu le veut» en latin, cri de ralliement de la Première Croisade au XIe siècle récupéré ces dernières années par la mouvance suprémaciste blanche. Sur son bras, un drapeau américain orné d’un fusil d’assaut. A eux seuls, les tatouages de Pete Hegseth, choisi par Donald Trump pour être secrétaire à la Défense, en disent long sur le personnage. «Pete est dur, intelligent et un véritable partisan de l’idée “l’Amérique d’abord”», a déclaré mardi 12 novembre le président élu lors de son annonce. «Avec Pete à la barre, les ennemis de l’Amérique sont prévenus : notre armée redeviendra grande et l’Amérique ne reculera jamais», a-t-il poursuivi.

Mais peu après cette nomination choc, plusieurs médias américains ont révélé que cet ancien militaire de 44 ans avait été accusé d’agression sexuelle en 2017. La police de Monterey, en Californie, a confirmé jeudi avoir enquêté en octobre 2017 sur «une agression sexuelle présumée» dans un hôtel impliquant Pete Hegseth. Des contusions étaient visibles sur la cuisse droite de la victime présumée, a précisé la police. Si aucune plainte n’a été déposée contre lui, l’homme aurait versé une somme d’argent d’un montant inconnu à son accusatrice plusieurs années plus tard dans le cadre d’un accord de confidentialité, affirme le Washington Post. Pete Hegseth, lui, assure que leur relation était consentie. La révélation de cette affaire trahit en outre une quasi-absence de «vetting», ce scrupuleux et intrusif processus de filtrage des aspirants aux plus hautes fonctions qui est d’ordinaire de mise aux Etats-Unis. Sa nomination reste toutefois à confirmer.

Insuffisamment qualifié

Déjà pressenti pour travailler dans la première administration Trump en 2016, le parcours de Pete Hegseth avait été scruté par Justin Higgins, un ancien cadre républicain chargé d’effectuer ce minutieux travail d’investigation. A l’époque, Higgins avait jugé Hegseth «insuffisamment qualifié» pour les postes subalternes de secrétaire d’Etat à la Défense ou aux Anciens Combattants.

Et ces huit années n’auront pas apporté les compétences nécessaires pour diriger une administration titanesque – 3,4 millions de soldats et d’employés civils pour un budget annuel de plus de 850 milliards de dollars – à celui qui est désormais animateur de matinale sur la chaîne conservatrice Fox News, tacle Justin Higgins dans une tribune publiée samedi par MSNBC. «Hegseth compense l’expérience qui lui fait défaut par un discours partisan dangereux», explique-t-il, y voyant la raison du choix du nouveau président. «C’est une coquille vide qui joue les durs à la télévision. Il n’est pas difficile d’imaginer qu’il fera et dira tout ce que Trump veut», a-t-il asséné.

Diplômé des prestigieuses universités de Princeton et Harvard, l’ancien officier d’infanterie a servi dix-huit ans dans la Garde nationale. Il a été déployé en Irak et en Afghanistan, où il a décroché deux prestigieuses médailles militaires. Marié trois fois, Pete Hegseth dénonce une dérive «wokiste» dans les forces armées et s’oppose à la présence de militaires femmes au combat. Il se targue d’avoir obtenu de Donald Trump une grâce présidentielle pour deux soldats condamnés pour meurtre et la réintégration d’un troisième, condamné pour avoir posé avec un cadavre en Irak.

Croisade et lancer de hache

Autre sujet de polémique, il a lui-même révélé faire partie de la dizaine de militaires écartés du dispositif de sécurité de l’investiture du président démocrate Joe Biden le 20 janvier 2021, dans une interview sur le podcast de l’ancien membre des forces spéciales Shawn Ryan, diffusée deux jours après l’élection présidentielle du 5 novembre. «J’ai été taxé d’extrémisme à cause d’un tatouage par mon unité de la Garde nationale à Washington», y a-t-il déclaré, montrant sur sa poitrine la croix de Jérusalem, assurant qu’«il s’agit simplement d’un symbole chrétien».

Selon plusieurs médias, un autre tatouage a éveillé les soupçons de sa hiérarchie : l’inscription Deus vult. Ce slogan, utilisé comme cri de ralliement lors de la première croisade en 1096, donc, est également la dernière phrase de son livre paru en 2020, intitulé American Crusade. Ces deux mots ont été adoptés par certains membres de l’extrême droite, des suprémacistes blancs et des nationalistes chrétiens. «Il y a mille ans, après des années à céder du terrain aux hordes musulmanes conquérantes, le pape a ordonné une action militaire pour sauver l’Europe», précise Pete Hegseth dans son livre à propos de cette devise.

Autre frasque, dans une vidéo réapparue ces jours-ci et qui tourne en boucle sur les réseaux, on le voit participer à une compétition de lancer de hache et rater la cible. L’arme vient frapper un joueur de tambour qui se trouve à proximité et qui échappe de justesse à une blessure grave.