Les Etats-Unis ont connu un nouveau drame aérien alors que, dans le ciel de New York, le bruit des hélices continue de se faire entendre au rythme incessant des vols d’hélicoptères de tourisme et d’affaires. Six personnes sont mortes ce jeudi 10 avril, dont trois enfants, dans le crash d’un engin de tourisme dans l’Hudson, le fleuve qui sépare New York du New Jersey voisin, au niveau de Manhattan. Le vol n’aura duré que dix-huit minutes avant que l’hélicoptère ne perde ses hélices, vrille et chute brutalement. Une enquête a dans la foulée été ouverte sur les causes du crash.
Pourquoi une telle présence d’hélicoptères dans les airs de la mégapole américaine ? Combien d’accidents ont déjà été enregistrés ? Les vols en hélicoptères sont-ils moins sûrs que les vols en avion ? Libération fait le point.
Le nombre de vols déjà réduit de moitié
New York compte plusieurs héliports en pleine ville, du côté du fleuve Hudson ou du détroit de l’East River aux abords de Manhattan. Et avec un prix minimum d’environ 200 dollars (176 euros) pour un vol de quinze à vingt minutes, l’expérience de vol touristique s’avère attirante pour les touristes. Le New York Times estime alors que, chaque année, des dizaines de milliers de vols touristiques prennent le départ depuis les héliports de la mégapole et de ses environs. Ces vols offrent la possibilité de voir d’en haut la plupart des sites célèbres de la ville, comme Central Park, le One World Trade Center ou encore la Statue de la Liberté, précise le quotidien américain.
Mais afin de lutter contre ce tourisme qui suscite des critiques pour son bruit infernal et sa pollution, un accord a été conclu en 2016 entre la mairie et les opérateurs aériens. Résultat : le nombre de vols touristiques a été réduit de 60 000 à 30 000 par an. Les tours d’hélicoptères au-dessus de la ville sont davantage réglementés et limités à l’espace aérien au-dessus des fleuves entourant Manhattan. Une pause obligatoire a été instaurée le dimanche. Il s’agissait de l’une des conditions négociées afin de pouvoir continuer à exploiter l’héliport municipal situé près de Wall Street.
Quelles entreprises proposent ces tours en hélicoptère ?
Pour pouvoir profiter de la vue de Central Park depuis les airs, une recherche sur Internet et quelques clics suffisent pour trouver une société proposant un tour en hélicoptère au-dessus de New York. Dans le cas du crash survenu ce jeudi, l’engin, un Bell 206, avait été affrété par New York Helicopter Charter, une société qui organise des visites touristiques sur le site pour plusieurs centaines de dollars par vol depuis environ trente ans, rapporte le New York Times.
Selon le journal américain, la société avait toutefois été confrontée récemment à des difficultés financières, notamment en raison de l’accord conclu en 2016 et de changements dans les politiques de la ville sur le trafic aérien. New York Helicopter Charter avait alors déposé son bilan en 2019, comme le détaille Bloomberg. En décembre, un des hélicoptères loués par l’entreprise avait également été saisi par la justice, faute de paiements de frais de location à son propriétaire.
32 décès dans des accidents depuis 1977
Ces sorties en hélicoptère, qui attirent chaque année des milliers de touristes, continuent de se multiplier malgré de nombreux accidents. D’après un bilan établi par Associated Press, 32 personnes sont mortes depuis 1977 dans des accidents d’hélicoptère dans la ville la plus peuplée des Etats-Unis. En 2009, un engin transportant des touristes italiens avait par exemple percuté un petit avion privé, tuant neuf personnes. En 2013, un autre, exploité par New York Helicopter Charter, avait été contraint d’effectuer un atterrissage en urgence dans le fleuve Hudson, après avoir soudainement perdu toute sa puissance, décrit le New York Times. Aucune victime n’avait été à déplorer. Un autre cas encore : en 2018, un hélicoptère était tombé dans l’East River, tuant cinq personnes.
Pourquoi un tel danger ?
Les images ahurissantes d’hélices tournoyant dans le vide et d’hélicoptères en feu semblent se multiplier ces dernières années, en lien avec la prolifération de ce type de tourisme. Tous ces accidents interrogent alors sur les risques liés à l’activité des aéronefs, et leur dangerosité accrue comparée à d’autres moyens de transport aériens. Et si les avions de tourisme ont aussi le droit de survoler la ville, Wouter Dewulf, professeur de transport aérien à l’université d’Anvers, interrogé par Libération, souligne que les vols en hélicoptère comportent davantage de risques que ceux en avion. «Le système est tout à fait différent entre ces deux engins. Un avion nécessite beaucoup moins de manœuvres. En hélicoptère, on doit tourner et, dans l’exemple en question, faire le tour de la Statue de la Liberté, tourner vers le New Jersey. Tout ça en basse altitude. Alors forcément quand quelque chose se passe, le pilote n’a pas assez de temps pour réagir», explique le spécialiste. Il ajoute avoir déjà effectué ce trajet en hélicoptère au-dessus de New York, «une route exigeante pour les pilotes».
Wouter Dewulf précise également qu’un avion comporte au minimum deux moteurs, à l’inverse d’un hélicoptère qui n’en possède qu’un. «Dans un avion, les autres [moteurs] peuvent donc prendre le relais en cas d’accident. Mais dans les hélicoptères, en cas de défaut du moteur, l’aéronef sans hélices peut chuter très rapidement», poursuit-il. Pour autant, le spécialiste se veut rassurant sur ces accidents qui restent «très rares» et qui font davantage les gros titres pour leurs images impressionnantes que leur récurrence.