Plus d’une tonne de petits cachets bleus : la marine mexicaine a procédé lundi 2 décembre à la plus importante saisie de pastilles de fentanyl jamais réalisée dans le pays. Le ministre de la Sécurité publique, Omar Garcia Harfuch, s’est empressé d’annoncer l’exploit sur les réseaux sociaux, images à l’appui. L’opération a été menée dans l’Etat de Sinaloa, devenu synonyme de narcotrafic. Le manque à gagner pour les mafias est facile à calculer : les 200 millions de cachets du puissant opioïde auraient dû s’écouler à 1 ou 2 dollars pièce, au cours actuel, aux Etats-Unis et au Canada.
En dos acciones distintas encabezadas por @SEMAR_mx, elementos del Gabinete de Seguridad @SEDENAmx, @FGRMexico, @GN_MEXICO_ y @SSPCMexico en Sinaloa se logró el decomiso histórico más grande de fentanilo; Más de una tonelada de pastillas de fentanilo, dos hombres fueron… pic.twitter.com/QP6qJkjBIA
— Omar H Garcia Harfuch (@OHarfuch) December 4, 2024
L’opération s’est déroulée et deux temps et a aussi permis l’arrestation de deux narcos présumés. Le cartel jadis dirigé par Joaquín «El Chapo» Guzmán, condamné à la réclusion à perpétuité aux Etats-Unis en 2019, est aujourd’hui déchiré entre deux factions, d’un côté Los Chapitos, les enfants du parrain emprisonné, de l’autre La Mayiza, les fidèles d’Ismael «Mayo» Zambada García. Le point de non-retour entre les anciens alliés a été atteint par une trahison au mois de juillet : Mayo a été séquestré par Joaquín Guzmán López, un des quatre fils d’El Chapo, puis expédié au Texas et livré à la DEA, la police des stups américaine. Le trafiquant suspecté a été présenté à un juge de Brooklyn en octobre, et attend que la justice fixe la date de son procès.
Le coup porté aux narcos survient à point nommé, quelques jours après que Donald Trump a promis un châtiment exemplaire au Mexique : 25 % de hausse des tarifs douaniers tant que le voisin ne combattra pas le trafic de drogue, «en particulier le fentanyl», et le passage de migrants. La sanction, qui s’applique aussi au Canada et à la Chine, mais pour d’autres motifs, est censée entrer en vigueur dès le 20 janvier, jour d’arrivée du nouveau président à la Maison Blanche.
La tension a baissé d’un cran après l’envoi d’une lettre de Claudia Sheinbaum, la présidente mexicaine, à son futur homologue, où elle lui rappelle quelques vérités. D’abord, que «l’épidémie de fentanyl est un problème de consommation et de santé publique de [son] pays», et que les précurseurs chimiques des drogues de synthèse proviennent illégalement d’Asie, ce qui exige «une coopération internationale». Ensuite, que 70 % des armes saisies aux gangs criminels ont été fabriquées aux Etats-Unis. Un appel téléphonique entre les deux dirigeants, qualifié de «marvelous» par Trump, a suivi.
Selon les autorités sanitaires américaines, les surdoses mortelles d’opiacés de synthèse (dont le fentanyl) se réduisent. En 2023 a été enregistrée la première baisse depuis 2018 : 81 000 morts, contre 87 000 l’année précédente. La tendance devrait se confirmer cette année. En juin 2024, la baisse sur douze mois était de 15 %. L’explication n’est pas une moindre consommation, mais l’arrivée sur le marché de cachets plus légèrement dosés, donc moins mortifères. L’emploi en progression de la naloxone, un antidote efficace en cas de surdose, est aussi mis en avant.