En octobre 2021, les inspecteurs des douanes brésiliennes affectés à l’aéroport de Sao Paulo découvraient un joli butin en fouillant le sac à dos de l’assistant d’un ministre, qui revenait d’un voyage officiel au Moyen-Orient : un collier, une bague, une montre, une paire de boucles d’oreilles de la prestigieuse marque suisse Chopard… La valeur totale approchait les 3 millions d’euros. Dans le cadre d’une enquête au long cours, la police fédérale du Brésil recommande l’inculpation de Jair Bolsonaro, président à l’époque des faits, ont annoncé plusieurs médias brésiliens jeudi 4 juillet. L’ancien militaire d’extrême droite est soupçonné d’avoir tenté de s’approprier illégalement ces cadeaux officiels offerts par la monarchie saoudienne.
Dans les pays démocratiques, les présents remis aux chefs d’Etat par des hôtes étrangers sont en effet versés au patrimoine national, et ne sont en aucun cas considérés comme des cadeaux personnels. En France, ils sont conservés à la «réserve Alma», un garde-meubles huppé, proche des quais de Seine dans le VIIe arrondissement de Paris, et dont l’adresse est tenue secrète. Certaines pièces sont exposées lors des Journées du patrimoine, ou rejoignent le musée du président Jacques-Chirac à Sarran, en Corrèze.
Palabres captées par les caméras de surveillance
Jair Bolsonaro et son entourage auraient tenté de contourner cette règle. Les bijoux avaient été offerts lors d’une visite du ministre des Mines et de l’Energie brésilien en Arabie Saoudite, en 2021. Mais au lieu de les déclarer au retour, la délégation avait tenté de les soustraire aux contrôles en les fourrant dans le bagage d’un assistant. Les palabres du ministre pour conserver le magot avaient été captées par les caméras de surveillance. Par la suite, ont déterminé les enquêteurs, Bolsonaro a fait plusieurs démarches pour récupérer les bijoux, restés consignés à l’aéroport, où ils ont été exposés au public. La dernière tentative aurait eu lieu fin décembre 2022, trois jours avant la fin de son mandat et l’entrée en fonction de Lula, son adversaire de gauche.
Les révélations en cascade sur la cavale des bijoux saoudiens ont transformé l’affaire en feuilleton qui tient en haleine l’opinion depuis plus d’un an. Au cours de leurs recherches, les enquêteurs ont découvert que deux autres lots, de moindre valeur, avaient été introduits en contrebande : ils comprenaient une montre, une chevalière, des boutons de manchette et un stylo à plume. Interrogé, l’ancien président avait fini par reconnaître qu’il était le destinataire de l’offrande, et qu’il l’avait conservée.
«Persécution éhontée»
La Cour des comptes a exigé que les deux cadeaux soient rendus, ce qui a été fait. Mais pas d’autres objets emportés dans ses cartons par Bolsonaro lorsqu’il a quitté le Palais de l’Alvorada, à Brasilia. Le gouvernement actuel a assuré qu’à l’arrivée de Lula, 261 biens manquaient à l’inventaire de la résidence présidentielle, notamment des meubles des années 60, créés par les meilleurs designers du pays.
A perseguição a Bolsonaro é declarada e descarada!
— Flavio Bolsonaro (@FlavioBolsonaro) July 4, 2024
Alguém ganha um presente, uma comissão de servidores públicos decide que ele é seu. O TCU questiona e o presente é devolvido à União. Não há dano ao erário!
Aí o grupo de PFs, escalados a dedo pra missão, indicia a pessoa.
Sur la base du rapport de la police fédérale, le ministère public devra décider s’il y a lieu ou non de poursuivre l’ex-président pour association criminelle, blanchiment d’argent et détournement de fonds, en vue d’un procès devant la Cour suprême fédérale. Onze autres personnes risquent aussi une inculpation, dont l’avocat Fabio Wajngarten. L’ex-président nie avoir commis des infractions et son fils, le sénateur Flavio Bolsonaro, a dénoncé sur X une «persécution éhontée» contre son père. Il affirme que les biens disparus avaient été restitués à l’Etat et qu’à ce titre il n’y avait pas eu de «préjudice pour le trésor public».