Menu
Libération
Justice

Au Chili, la justice ordonne la réouverture de l’enquête sur la mort de Pablo Neruda

Décédé en septembre 1973, douze jours après le coup d’Etat d’Augusto Pinochet au Chili, le poète communiste a officiellement succombé à un cancer. Ce mardi 20 février, la justice chilienne a ordonné la réouverture de l’enquête sur sa mort.
Le poète chilien Pablo Neruda s'appuie sur la rambarde d'un bateau au large de New York, le 13 juin 1966. (Sam Falk/Getty Images)
publié le 20 février 2024 à 18h03

Pablo Neruda s’est éteint le 23 septembre 1973 dans une clinique de Santiago du Chili et, cinquante plus tard, les conditions de sa disparition sont toujours confuses. Le poète a-t-il été éliminé par les hommes du général Augusto Pinochet, qui s’était emparé du pouvoir par la force moins de deux semaines plus tôt ? C’est pour enfin «contribuer à l’éclaircissement des faits» que la justice chilienne a ordonné ce mardi 20 février la réouverture de l’enquête sur la mort du prix Nobel de littérature 1971. Un homme que l’écrivain colombien Gabriel García Márquez décrivait comme «le plus grand poète du XXe siècle, toutes langues confondues».

Cette décision était réclamée par des proches du poète, ainsi que par le Parti communiste chilien, dont Pablo Neruda était membre. Elle annule l’ordonnance de clôture de l’enquête prise en décembre 2023 par la juge chargée de l’affaire, Paola Plaza. En 2017, des experts internationaux ont rejeté à l’unanimité la version officielle du régime militaire, selon laquelle l’ancien sénateur et ambassadeur de France, 69 ans à l’époque des faits, avait succombé à une aggravation subite de son cancer. Néanmoins, ils n’avaient pu confirmer ni exclure la possibilité d’une contamination volontaire et délibérée par l’injection de germes ou de toxines bactériennes.

Selon les plaignants, Pablo Neruda est mort empoisonné, à la veille de son départ pour le Mexique où il envisageait de s’exiler pour y diriger l’opposition au régime de Pinochet après la disparition du président Salvador Allende, un ami proche, assassiné le 11 septembre 1973.

D’après des chiffres officiels, la dictature d’Augusto Pinochet a fait quelque 3 200 morts jusqu’au départ du despote ultralibéral et sanguinaire, en 1990. Parmi les victimes de cette répression, on trouve un autre artiste passé à la postérité : le chanteur Victor Jara, torturé et abattu lors de ce même mois de septembre 1973. Fin août 2023, la Cour suprême a confirmé les condamnations de sept anciens militaires responsables de cet assassinat, et ceux-là ont enfin été incarcérés. Il n’est jamais trop tard.