Cela ressemble à n’importe quelle autre concession minière de la région, dans le nord du Pérou, premier producteur d’or d’Amérique du Sud. De profondes tranchées entourées par la forêt amazonienne, une pelleteuse chargée d’extraire des tonnes de gravats qui contiennent (peut-être) de l’or, et un ballet incessant de camions qui transportent le tout vers un grand tapis métallique où la terre rocheuse est nettoyée et tamisée une première fois. Cette exploitation bien rodée appartient à Lucila Huanca, une petite femme d’une cinquantaine d’années, gilet réfléchissant sur les épaules et bijoux en or aux mains : «Moi je suis née ici, je suis fille de mineur et je vis dans les mines depuis que je suis enfant. Ici c’est ma maison, c’est mon travail.» Elle et son mari, Juan Chaman, sont propriétaires depuis quatorze ans de cette concession de 300 hectares qui emploie une douzaine de personnes, dans le village de Sarayacu, sur les rives de la rivière Madre de Dios.
La région éponyme est le centre névralgique de l’orpaillage artisanal péruvien depuis les années 80. Le paysage y est presque sidérant : au cœur de l’Amazonie, ce sont les arbres qui font tache au milieu des carrières de gravats ocre et d’étangs d’eau boueuse maintes fois fouillés. Ici, des générations de mine