L’opposition avait prévenu : elle considérerait «nulle et non avenue» toute décision du Tribunal suprême de justice (TSJ) sur l’élection de Nicolás Maduro. Sans grande surprise, la juridiction, que la plupart des observateurs considèrent comme inféodée au pouvoir en place, a validé ce jeudi 22 août la réélection du président socialiste. La Cour «certifie de manière non contestable le matériel électoral et valide les résultats de l’élection présidentielle du 28 juillet 2024 […] où le citoyen Nicolás Maduro Moros a été élu président de la République bolivarienne du Venezuela pour la période constitutionnelle 2025-2031», a fait savoir sa présidente, Caryslia Rodriguez, qui avait auparavant rappelé que ses décisions étaient «sans appel».
Cela fait désormais près d’un mois que le dirigeant socialiste a été proclamé vainqueur de la présidentielle du 28 juillet par le Conseil national électoral (CNE), avec 52 % des voix. Pourtant, ce dernier n’a toujours pas publié le détail du décompte des voix, affirmant être victime d’un piratage informatique. Depuis, l’opposition dénonce une fraude, et revendique la victoire de son candidat, Edmundo González Urrutia. De quoi pousser Nicolás Maduro, qui ne cesse de répéter qu’il fait face à une tentative de «coup d’Etat», à déposer un recours début août devant la haute instance pour faire valider sa victoire.
«Votre décision ne fera qu’aggraver la crise»
Mais du côté de l’opposition, le message est clair : «Tout arrêt éventuel de la Chambre électorale [du Tribunal suprême de justice] qui pourrait valider la fraude électorale que l’on veut imposer serait nul et non avenu», assurait un texte diffusé sur les réseaux sociaux mercredi 21 août par la cheffe de file de l’opposition, Maria Corina Machado. «Les magistrats» de la Cour suprême «violeraient les droits inaliénables des électeurs et engageraient leur responsabilité pénale, civile et administrative», ajoutait la lettre ouverte, approuvée par la coalition Plataforma Unitaria Democratica (PUD), qui regroupe les principaux partis d’opposition.
Récit
Ce jeudi matin, Edmundo Gonzalez Urrutia a réitéré sa position. «Messieurs du TSJ : aucune décision ne remplacera la souveraineté populaire. Le pays et le monde connaissent votre partialité et, par conséquent, votre incapacité à résoudre le conflit ; votre décision ne fera qu’aggraver la crise», a déclaré le candidat de l’opposition sur les réseaux sociaux, appelant Nicolás Maduro à permettre une «transition politique» dans la paix.
Selon l’opposition, qui a publié sur Internet des copies des procès-verbaux obtenus grâce à ses scrutateurs, son candidat a remporté le scrutin avec plus de 60 % des voix. Le pouvoir, lui, rejette la validité de ces documents. L’annonce de la réélection de Nicolás Maduro pour un troisième mandat a provoqué des manifestations spontanées, qui ont été brutalement réprimées. Elles ont fait 27 morts, selon un nouveau bilan jeudi des autorités. En outre, 192 personnes ont été blessées et 2 400 arrêtées.
Onze pays rejettent la décision du tribunal
Vendredi 23 août, les Etats-Unis ainsi que dix pays d’Amérique latine ont rejeté la décision de la justice vénézuélienne de valider la victoire de Nicolas Maduro. L’Argentine, le Costa Rica, le Chili, l’Équateur, le Guatemala, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République dominicaine, l’Uruguay et les Etats-Unis affirment rejeter «catégoriquement l’annonce du Tribunal suprême de justice (TSJ) du Venezuela qui indique avoir conclu une prétendue vérification des résultats du processus électoral». Le Venezuela a par la suite qualifié ce rejet d’«acte inacceptable d’ingérence».
Dans le même temps, le procureur général du Venezuela Tarek William Saab a affirmé que le candidat de l’opposition vénézuélienne Edmundo Gonzalez Urrutia, qui revendique la victoire à la présidentielle du 28 juillet, allait être convoqué par le parquet pour une enquête pénale. Selon le chef du ministère public, le site internet sur lequel l’opposition a publié ses résultats de la présidentielle «usurp [ait]» le pouvoir du Conseil national électoral (CNE).
Mise à jour : 23 août à 20h30, ajout du rejet de la décision du TSJ par 11 pays, ajout des déclarations du procureur général du Venezuela.