Un «théâtre de guerre et de barbarie» en pleine journée à Rio de Janeiro. Ce mardi 28 octobre, une vaste opération policière contre l’un des principaux gangs de narcotrafiquants s’est soldée à Rio de Janeiro par la mort d’au moins 132 personnes, dont quatre agents des forces de l’ordre, selon un bilan revu à la hausse ce mercredi 29 octobre. Le gouverneur de Rio s’est félicité d’avoir mené la «plus grande opération de l’histoire» de son Etat. C’est désormais aussi la plus meurtrière. Au total, 2 500 agents étaient mobilisés.
L’opération s’est concentrée sur deux ensembles de favelas du nord de Rio de Janeiro, situées à proximité de l’aéroport international : Complexo da Penha et Complexo do Alemao. Un photographe de l’AFP a vu des policiers lourdement armés emmenant plusieurs hommes détenus, pour la plupart pieds et torse nus, à Vila Cruzeiro, une favela du Complexo da Penha. Si quelques habitants circulaient, la vie était presque à l’arrêt dans cette favela où résonnaient de nombreux tirs.
Cette expédition visait à «combattre l’expansion territoriale du Comando Vermelho (Commando rouge)», l’une des principales factions criminelles du Brésil, implantée dans plusieurs Etats du pays, a précisé le gouvernement de l’Etat de Rio sur X. Les autorités ont par ailleurs annoncé l’arrestation de «81 criminels» et la saisie de 42 fusils. Le gouverneur a précisé qu’au moins trente mandats d’arrêt concernaient des suspects venus d’autres Etats brésiliens, et évoqué la saisie d’«une grande quantité de drogue», sans donner davantage de précision.
Les policiers ont mobilisé deux hélicoptères, 32 véhicules blindés et «douze véhicules de démolition» utilisés pour détruire des barricades dressées par les narcotrafiquants pour empêcher le passage de la police dans les ruelles des favelas. Claudio Castro a publié sur X une vidéo d’un drone lançant un projectile depuis le ciel nuageux. «C’est comme ça que la police de Rio est reçue par les criminels : avec des bombes lancées par des drones. C’est l’ampleur du défi auquel nous faisons face. Il ne s’agit pas de crime ordinaire, mais de narcoterrorisme», a-t-il commenté. Des images circulant sur les réseaux sociaux montrent aussi de longues colonnes de fumée s’échappant d’une favela, tandis que retentissent des rafales de tirs.
Des opérations régulières et pas forcément efficaces
Les opérations policières sanglantes sont fréquentes à Rio, principal pôle touristique du Brésil, malgré leur efficacité contestée. Elles visent notamment les favelas, quartiers pauvres et densément peuplés vivant souvent sous le joug de trafiquants de drogue. La Cour suprême du Brésil a imposé en 2020 certaines restrictions à ces opérations, comme la limitation de l’utilisation des hélicoptères et des actions dans les zones proches des écoles ou des centres de santé. Ces deux restrictions ont cependant été levées cette année par la même juridiction.
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Des spécialistes et des organisations de défense des droits humains critiquent cette stratégie des forces de sécurité, la jugeant peu efficace contre les organisations criminelles. La commission des droits de l’homme de l’Assemblée législative de l’État de Rio a annoncé qu’elle exigerait «des explications sur les circonstances de l’action, qui a de nouveau transformé les favelas de Rio en un théâtre de guerre et de barbarie». En 2024, environ 700 personnes sont mortes lors d’interventions des forces de l’ordre à Rio de Janeiro, soit presque deux par jour.
Mise à jour à 16 h 05 avec le bilan revu à la hausse.