Deux mois après le début d’un déploiement militaire étasunien face aux côtes du Venezuela, l’animosité de Donald Trump vis-à-vis de la république bolivarienne n’a pas diminué, mais ses intentions ne sont pas plus claires. Dimanche 2 novembre, le président américain était l’invité de 60 Minutes sur la chaîne CBS, le plus célèbre magazine d’info télé aux Etats-Unis. A la journaliste Norah O’Donnell qui lui demandait si «les jours de Nicolás Maduro [étaient] comptés», il a répondu : «Je dirais que oui, je pense que oui». Relancé sur une éventuelle intervention militaire sur le sol vénézuélien, il a déclaré : «J’en doute, je ne pense pas. Mais ils nous ont très mal traités.» Mais si l’option militaire s’imposait, insiste la journaliste ? «Ce ne serait pas à vous que je le révélerais», tranche l’hôte de la Maison-Blanche. Nouvel exemple de l’art trumpien de répondre à côté et de laisser toutes les interprétations ouvertes.
La campagne antidrogue menée par son administration contre de supposées embarcations de narcotrafiquants a débuté le 2 septembre dans les eaux internationales des Caraïbes. Ce jour-là, un bateau provenant du Venezuela a été détruit par les forces américaines. A ce jour, 15 autres opérations ont eu lieu, portant le bilan total à au moins 65 victimes.
Navires de guerre, avions de chasse, bombardiers…
Donald Trump et son entourage n’ont pas encore présenté des preuves irréfutables qui confirment leurs accusations, ce qui n’empêche pas le magnat américain de se féliciter pour ses actions en mer de Caraïbes. «Chaque navire coulé signifie 25 000 vies sauvées», a-t-il déclaré. Selon la BBC, l’arsenal de navires de guerre, avions de chasse, bombardiers, marines, drones et avions espions est le plus grand déploiement engagé dans ce territoire depuis des décennies.
Au Venezuela, Nicolás Maduro est persuadé que les attaques n’ont d’autre but que de le renverser. Déjà en 2019, lors de son premier mandat, Trump avait déclaré qu’une «intervention militaire» américaine dans le pays était «une option». Le successeur de Hugo Chávez accuse son homologue de «fabriquer une guerre» et de convoiter les réserves pétrolières vénézuéliennes. Autre cible de la Maison Blanche, le président colombien Gustavo Petro juge que Trump veut «dominer» toute l’Amérique du Sud.
Le 29 août, trois jours avant la première attaque, Donald Trump avait accusé Maduro d’être à la tête d’un réseau de narcotrafic, le Cartel de los Soles, et offert 50 millions de dollars de récompense pour l’arrestation du président vénézuélien. Pourtant, pour Phil Gunson, analyste chez International Crisis Group (ICG), «il est difficilement envisageable que Maduro soit le chef de quelque chose qui n’existe pas» car, en l’absence de preuves directes et irréfutables, ce cartel «est une fable».
Moscou à la rescousse de Caracas
Un autre des griefs de Washington contre le président vénézuélien est sa proximité avec Pékin et Moscou. Le 26 octobre, un avion russe a atterri sur le sol vénézuélien. L’avion aurait, selon le site FlightRadar24, contourné l’espace aérien des pays occidentaux en transitant par l’Arménie, l’Algérie et le Sénégal, pour enfin rejoindre sa destination finale. Nicolás Maduro avait, quelque jour avant, adressé un courrier à Vladimir Poutine pour solliciter son soutien face aux menaces de Trump. Révélée par le Washington Post, la lettre demandait notamment «des missiles, des radars et des avions modernisés». La coopération politique entre la Russie et le Venezuela, lancée par le défunt président Hugo Chávez, s’étend à plusieurs domaines, de la pétrochimie aux achats d’armes en passant par les cryptomonnaies. Un autre appel à l’aide a été envoyé au Chinois Xi Jinping, lui demandant «une coopération militaire élargie».
Une chute du président Maduro ne serait pas une bonne nouvelle pour la Russie. En juillet, Moscou avait installé une usine de munitions pour kalachnikov dans l’Etat d’Aragua, sur la côte des Caraïbes, un lieu stratégique pour l’import et l’export. La Russie y possède également des droits d’exploitation de réserves de gaz naturel et de pétrole pour des milliards de dollars.