«Nous ne nous laisserons pas faire». Le nouveau Premier ministre canadien, Mark Carney, a convoqué ce dimanche 23 mars des élections anticipées pour le 28 avril, affirmant qu’il avait besoin d’un «mandat fort» pour faire face à la menace que les tarifs douaniers du président américain Donald Trump font peser sur l’économie. Donald Trump «veut nous briser pour que l’Amérique puisse nous posséder», a estimé Mark Carney, promettant de s’y opposer. Dans une vidéo humoristique en guise de lancement de campagne, le Premier ministre l’assure : «le Canada existera toujours».
Elbows up, Canada.
— Mark Carney (@mark-carney.bsky.social) 22 mars 2025 à 23:11
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Remontada
Bien que les prochaines élections ne devaient avoir lieu que le 20 octobre, le Premier ministre canadien espère tirer parti de la remarquable remontée de son parti dans les sondages depuis janvier, lorsque le président américain a commencé à menacer le Canada et que son prédécesseur, Justin Trudeau, a annoncé sa démission. A l’heure actuelle, le parti de Mark Carney est minoritaire au parlement. «Nous sommes confrontés à la crise la plus importante de notre vie à cause des actions commerciales injustifiées du président Trump et de ses menaces contre notre souveraineté», a averti le Premier ministre.
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Pour ce faire, l’homme politique a demandé ce dimanche à la gouverneure générale de dissoudre le Parlement et d’organiser des élections pour le 28 avril, «et elle a accepté». Si Mark Carney est un novice en politique – il n’a jamais été ni député, ni ministre – il a su convaincre la direction du parti libéral qu’il était la personne la mieux placée pour riposter face à Donald Trump. L’économiste, qui a fait fortune en tant que banquier d’affaires chez Goldman Sachs avant de diriger la Banque du Canada, puis celle d’Angleterre, a promis de s’appuyer sur son expérience des crises.
Cinq semaines pour convaincre
Il dispose à présent de cinq semaines pour convaincre les Canadiens. Alors qu’un vent de patriotisme agite le pays, la population place pour cette élection les relations avec les Etats-Unis en tête de leurs préoccupations. Une question domine : qui, à la tête du Canada, pourra faire face à Donald Trump ? Une configuration extraordinaire, alors que les élections canadiennes sont d’ordinaire centrées sur des questions de politique intérieure, entre coût de la vie, crise du logement ou encore immigration.
Dans ce panorama politique complètement remanié, libéraux et conservateurs sont au coude-à-coude selon les derniers sondages, et la course s’annonce serrée. Un total revirement tant les libéraux au pouvoir depuis dix ans semblaient, il y a quelques semaines encore, promis à une défaite électorale historique face aux conservateurs, jusqu’à ce que le président américain ne vienne mettre la politique canadienne sens dessus dessous. «Il est impossible à ce stade de faire des prédictions», estime auprès de l’AFP Félix Mathieu, politologue à l’université de Winnipeg. «Mais cela va être une élection très suivie avec un taux de participation qui devrait être en hausse.» «Beaucoup considèrent que c’est une élection existentielle, du jamais-vu», ajoute-t-il.
Le Québec, clé de la victoire ?
Tout oppose les deux principaux candidats : élu député à 25 ans, le conservateur Pierre Poilièvre est un politicien professionnel, qui ne mâche pas ses mots et aime les formules chocs. Or, d’après Reuters, une bonne performance dans la province du Québec, majoritairement francophone, serait la clé pour une éventuelle victoire. Lors d’une conférence de presse, Mark Carney a éprouvé des difficultés lorsqu’on lui a demandé de répondre en français : il a d’abord mal compris la question et a ensuite répondu en anglais. Pierre Poilièvre, lui, parle parfaitement bien français.
Interview
Quant aux autres partis, ils pourraient fortement pâtir de la volonté des électeurs de favoriser les grandes formations pour donner une majorité claire. Ainsi, le Nouveau Parti démocratique (NPD), comme le Bloc québécois, enregistrent des intentions de vote en baisse. La campagne sera rythmée par la question tarifaire puisque, dès le 2 avril, les droits de douane dits «réciproques» voulus par Donald Trump doivent entrer en vigueur. Ce dernier s’est déjà vanté vendredi d’avoir «complètement modifié l’élection» tout en précisant qu’il se «moquait de savoir qui gagnera».