La manœuvre était d’une audace inouïe. Pas même sous Jair Bolsonaro, son chef de file, l’extrême droite brésilienne n’avait osé aller aussi loin dans son offensive pour faire interdire totalement l’avortement au Brésil, où l’IVG, prohibée par le code pénal, est toutefois dépénalisée dans quelques très rares cas. Le projet de loi déposé le mois dernier par un groupe de 33 députés assimile en effet à un homicide toute interruption de grossesse après la 22e semaine, et cela, même en cas de viol, une des situations dans lesquelles l’avortement est autorisé. Ainsi, les victimes d’agressions sexuelles – souvent des mineures de moins de 14 ans – devraient porter l’enfant de leur agresseur, faute de quoi, elles s’exposeraient à une peine de prison plus lourde que l’auteur du viol lui-même…
Sans la réaction rapide du mouvement féministe – qui a tranché sur l’inertie du gouvernement –, ce texte aurait déjà été soumis au vote la semaine dernière, sans même avoir été examiné au préalable en commission. Son principal promoteur, le député et pasteur Sóstenes Cavalcante, membre du puissant lobby parlementaire évangélique (et du parti de Bolsonaro), assurait pouvoir réunir rien moins que deux tiers des 513 voix des députés. «Nous verrons alors si Lula, qui affirme être contre l’avortement, fera usage du droit de veto présidentiel», avait-il défié. L’objectif était clair : mettre le leader de gauche dos au mur, pour le dépeindre auprès des chrétiens en adversaire de la «vie», s’