Des millions «d’inscriptions non sollicitées» à Prime, une résiliation impossible… L’agence américaine de protection des consommateurs, FTC, a ouvert en 2023 une affaire accusant Amazon d’avoir sciemment déployé des interfaces manipulatrices, appelées «dark patterns».
La plateforme est ainsi accusée d’avoir gagné des abonnés sans leur consentement explicite grâce à des processus de paiement confus, mais aussi d’avoir créé un système d’annulation délibérément complexe. Il aurait été surnommé «Iliade» en interne, du nom du poème d’Homère sur la longue et difficile guerre de Troie.
«Labyrinthe»
Selon la FTC, le processus de paiement d’Amazon obligeait les clients à naviguer dans des interfaces compliquées, où le refus de l’adhésion à Prime nécessitait de cliquer sur de petits liens discrets, tandis que l’adhésion se réalisait en cliquant sur de gros boutons bien en évidence. Le prix, 139 dollars par an, et le renouvellement automatique étaient souvent cachés ou en petits caractères.
Le procès vise aussi le processus de résiliation d’Amazon, qui obligeait les clients à naviguer, selon la FTC, dans un «labyrinthe» de quatre pages, six clics et 15 options pour annuler l’abonnement.
Une stratégie rentable pour la plateforme, les abonnements Prime représentant 25 milliards de dollars du chiffre d’affaires annuel d’Amazon, selon le dossier d’accusation de 2023. Ce qui pousse la FTC à accuser la plateforme d’avoir «sciemment trompé des millions de consommateurs» et d’avoir manqué à ses exigences de transparence.
Accusations caduques
L’affaire se fonde en effet en partie sur la loi ROSCA, entrée en vigueur en 2010, qui interdit de facturer des services en ligne activés par défaut, sans indiquer clairement les conditions, ni obtenir le consentement explicite des clients et fournir des procédures simples de désabonnement. L’agence demande donc à la cour de prononcer des sanctions, d’accorder des compensations financières et d’enjoindre l’entreprise à changer ses pratiques.
Du côté de la défense, Amazon fera valoir que cette loi et les autres réglementations n’interdisent pas clairement les pratiques en débat et que la FTC est allée trop loin. L’entreprise a aussi dit qu’elle avait amélioré ses processus d’inscription et d’annulation et que les accusations étaient caduques.
Etats-Unis
Ces affaires font partie d’une série de poursuites récentes entamées par l’administration américaine, aussi bien démocrate que républicaine, pour limiter la domination de plusieurs grandes entreprises des technologies, telles que Google ou Apple, après des années de mansuétude gouvernementale.
Le procès devrait durer environ quatre semaines et s’appuiera sur les communications et les documents internes d’Amazon, ainsi que sur les témoignages des dirigeants et des experts du groupe. En 2027, Amazon comparaîtra à nouveau devant le jury de la Cour de Seattle pour des accusations de monopole illégal par FTC.