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Libération
Colons irritables

Des Afrikaners bientôt accueillis aux Etats-Unis : l’immigration à géographie variable de Donald Trump

Les descendants de colons européens en Afrique du Sud, dont Donald Trump accuse le gouvernement de persécuter les Blancs, sont éligibles au statut de réfugiés aux Etats-Unis.
Un manifestant tenant une pancarte pour manifester contre la décision du gouvernement américain d'accueillir des Afrikaners, le 1er mars 2025. (Michael Nigro/Spus. Abaca)
publié aujourd'hui à 17h04

Les Etats-Unis accueillent bien des réfugiés, mais pas n’importe lesquels. Au rayon des exceptions acceptées par l’administration Trump, les Afrikaners, la principale communauté blanche d‘Afrique du Sud, descendants de colons néerlandais arrivés dans la région il y a trois siècles, pour lesquels Washington fait une exception à son implacable politique anti-immigration. De quoi nourrir l’inquiétude de Pretoria, qui a fait part de sa «préoccupation».

Selon le média américain NPR, les Etats-Unis accueilleront 54 réfugiés Afrikaners le 12 mai prochain, conséquence directe du décret signé par Donald Trump en février autorisant la création d‘une procédure d‘asile accélérée pour les membres de cette communauté que le milliardaire estime «victimes d‘une discrimination raciale injuste». Un jugement nourri par le vote d’une loi sud-africaine, le 23 janvier dernier, permettant la saisie de terres, parfois sans indemnisation, pour «promouvoir l’inclusivité et l’accès aux ressources naturelles».

Une méconnaissance de «l’histoire profonde et douloureuse de l’apartheid»

En Afrique du Sud, la majeure partie des terres restent détenues par des familles blanches, héritage de politiques d‘expropriation de la population noire menées pendant l’apartheid, le régime ségrégationniste qui a sévi dans le pays jusqu’en 1990. Donald Trump s’est indigné du passage de cette loi, considérant sur son réseau Truth Social : «Ils leur prennent leurs terres, et ensuite ils les tuent, ainsi que leur famille.» Il a également qualifié cette loi de «confiscation raciale» au détriment des Blancs, qu’il estime plus globalement victime de persécution.

L’idée selon laquelle les Sud-Africains blancs sont discriminés s’est répandue dans les cercles d‘extrême droite, reprise par Elon Musk, allié de Donald Trump, lui-même natif d‘Afrique du Sud. Il considère que le pays empêche son entreprise de satellites Starlink, de faire affaire dans le pays. Le milliardaire a déclaré début mars que son entreprise n’était «pas autorisée à opérer en Afrique du Sud, simplement parce qu’[il] n[’est] pas noir».

L’Afrique du Sud n’a pas laissé les accusations lettre morte. A Donald Trump, la ministère des Affaires étrangères sud-africain a répondu que son décret «manquait d‘exactitude factuelle et ne reconnaissait pas l’histoire profonde et douloureuse du colonialisme et de l’apartheid» dans le pays, où les Afrikaners constituent la majorité des 7,3 % de Blancs en Afrique du Sud. La présidence du pays a de son côté réfuté toute intention «de confisquer des terres». S’agissant des accusations d’Elon Musk, l’autorité indépendante des communications d’Afrique du Sud a répliqué auprès de la BBC que Starlink n’avait jamais effectué la moindre demande de licence pour s’installer dans le pays.

Un accueil en grande pompe dissonant

Selon plusieurs médias américains, les 54 premiers «réfugiés afrikaners» devraient arriver lundi 12 mai aux Etats-Unis, à l’aéroport de Washington Dulles, en Virginie. D’après le New York Times, l’administration de Donald Trump prévoit d‘envoyer une délégation à l’aéroport de Washington Dulles, en Virginie, pour un événement marquant l’arrivée des Sud-africains.

Un accueil en grande pompe qui dissone avec la position actuelle du gouvernement sur l’immigration. Jeudi 8 mai, l’administration Trump a demandé à la Cour suprême américaine de l’autoriser à révoquer le statut légal de migrants vénézuéliens, cubains, nicaraguayens et haïtiens. Joe Biden avait autorisé les 530 000 ressortissants de ces quatre nationalités à résider dans le pays pour deux ans, en raison de la situation des droits humains dans leurs pays respectifs. Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, son administration opère une chasse aux immigrés clandestins. Elle a procédé à l’expulsion de centaines d‘exilés par avions militaires et a procédé à de nombreuses arrestations massives.