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Etats-Unis

Discours sur l’état de l’Union : Joe Biden arrivera-t-il à faire décoller sa campagne face à Donald Trump ?

Ce grand moment annuel de théâtre politique sera particulièrement scruté ce jeudi 7 mars, à huit mois de l’élection présidentielle qui devrait départager l’octogénaire démocrate de l’extrémiste milliardaire.
Joe Biden le 5 mars 2024. (Alex Brandon/AP)
publié le 7 mars 2024 à 11h33

D’ordinaire plus cérémonieux que réellement décisif, le rituel du pensionnaire de la Maison blanche prend cette année un relief particulier. Lors de son discours sur l’état de l’Union prévu ce jeudi 7 mars à 21 heures (3 heures du matin heure française), le président américain Joe Biden cherchera à faire décoller sa campagne contre son concurrent Donald Trump, l’élection du 5 novembre en ligne de mire. «Vous m’avez choisi pour faire le boulot, construire une économie qui profite à tout le monde, offrir une vie meilleure aux familles. Demain je vous parlerai de nos progrès et de nos projets», a écrit le démocrate de 81 ans à ses compatriotes sur le réseau social X (ex-Twitter).

Candidat pour un second mandat, Joe Biden estime avoir «fait plus en trois ans que la plupart des autres présidents en huit», avec ses grands chantiers d’infrastructures, ses gigantesques investissements dans la transition énergétique, et ses mesures de pouvoir d’achat sur les médicaments ou la dette étudiante. A l’heure où les parlementaires républicains bloquent la reprise d’une aide militaire à l’Ukraine, le président américain sera également attendu au tournant sur le conflit en Europe. Celui à Gaza sera aussi à l’ordre du jour.

Au Capitole de Washington, le responsable du protocole de la Chambre des représentants clamera la formule rituelle adressée au chef de cette institution – présentement le trumpiste Mike Johnson – : «Monsieur le Speaker, le président des Etats-Unis !» Mais c’est en candidat que Joe Biden s’avancera alors entre les travées. Face à des millions de téléspectateurs, il lui faudra prouver son endurance lors d’un discours qui, traditionnellement, dure plus d’une heure, et insuffler un peu de son éternel optimisme à une Amérique désabusée. L’octogénaire, en bonne santé selon son médecin, montrera-t-il des signes de fatigue, des absences ? Bafouillera-t-il ? Saura-t-il répondre avec le même aplomb que l’an dernier si des élus trumpistes se mettent à l’invectiver ?

Donald Trump «corrigera» le discours en direct

Côté républicain, on ne lui épargnera aucun faux pas : Donald Trump a promis de «corriger» le discours de son rival en direct. Le magnat de 77 ans réclame surtout de débattre «n’importe où, n’importe quand» avec Joe Biden, sans attendre qu’ils soient investis cet été par les conventions de leurs partis respectifs.

Si les primaires se poursuivent, l’ex-président a le champ libre depuis le retrait de Nikki Haley, seule prétendante républicaine encore en lice face à lui. Après avoir été largement distancée par le milliardaire lors du «Super Tuesday» – journée qui concentre les primaires de plusieurs Etats –, elle a décidé de jeter l’éponge. Sans surprise, Joe Biden a lui réalisé des scores astronomiques.

Sauf imprévu, les électeurs américains feront donc face en novembre au même choix qu’il y a quatre ans. Une perspective qui ne les enchante guère, à en croire les sondages. D’un côté, un président profondément impopulaire mais persuadé, malgré son grand âge, d’être le meilleur rempart de la démocratie américaine – Joe Biden. De l’autre, un ancien chef d’Etat cerclé de casseroles judiciaires, qui promet à ses partisans de «venger» sa défaite de 2020, qu’il n’a jamais reconnue – Donald Trump.

La défense du droit à l’avortement mis à l’honneur

Ce discours est une vieille tradition américaine : la Constitution prévoit que le président informe «périodiquement» le Congrès sur «l’état de l’Union». Le premier président George Washington (1789-1797) s’était contenté d’une courte allocution de 1 000 mots – Joe Biden en a prononcé plus de 9 000 l’an dernier –, tandis que la plupart de ses successeurs ont rempli leur obligation constitutionnelle par écrit. Mais au fil du XXe siècle, le «State of the Union» s’est transformé en un grand moment de théâtre politique, avec ses rites et ses à-côtés.

Le «survivant», désigné ce jeudi par Joe Biden, en fait partie. Il s’agit d’un membre de son administration qui n’assiste pas au discours au Capitole : mis à l’abri dans un lieu tenu secret, il pourrait reprendre les rênes du pays dans l’éventualité où surviendrait une catastrophe qui décimerait les hauts représentants de l’Etat.

Autre tradition : la Maison Blanche invite des personnalités ou des citoyens incarnant ses priorités politiques. Cette année, ce sera la défense du droit à l’avortement, récemment devenu illégal ou largement restreint dans une vingtaine d’Etats américains. La Texane Kate Cox prendra donc place aux côtés de la Première dame Jill Biden – elle avait dû quitter son Etat pour mettre fin à sa grossesse, après avoir appris que le fœtus qu’elle portait n’était pas viable.

Joe Biden avait aussi convié Ioulia Navalnaïa, veuve de l’opposant russe Alexeï Navalny, et Olena Zelenska, l’épouse du président ukrainien Volodymyr Zelensky. Aucune des deux femmes n’assistera au discours, a toutefois annoncé la Maison Blanche, sans fournir plus d’explications.