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Justice

Donald Trump condamné pour diffamation à verser 83 millions de dollars à l’autrice E. Jean Carroll

L’ancien président américain, en campagne pour être réélu, a été reconnu coupable de diffamation contre la journaliste à la retraite Elizabeth Jean Carroll, qui l’accuse de l’avoir violée en 1996.
Donald Trump, vendredi 26 janvier à New York. (Eduardo Munoz/Reuters)
publié le 27 janvier 2024 à 17h40

Une condamnation de plus pour Donald Trump. L’ancien président américain a été reconnu coupable vendredi 26 janvier par le tribunal civil de New York de diffamation contre l’autrice E. Jean Carroll, sur fond d’accusations de viol dans les années 90. En guise de dédommagement, le magnat en campagne pour être réélu, doit verser à la plaignante un dédommagement colossal de 83,3 millions de dollars.

Une condamnation «ridicule» aux yeux du grand favori de la primaire républicaine et très probable adversaire de Joe Biden à la présidentielle de novembre. En annonçant faire appel, Trump a fustigé «une chasse aux sorcières dirigée par Biden contre [lui] et le Parti républicain».

Concrètement, ce montant astronomique de 83,3 millions de dollars, décidé par neuf jurés, comprend 65 millions de dollars de dommages et intérêts «punitifs» censés le dissuader de recommencer à s’en prendre à Carroll. Car le jury a souligné l’intention de «nuire» du milliardaire de 77 ans, reconnu responsable de propos diffamatoires à l’encontre de cette femme de 80 ans qui réclamait au moins 10 millions de dollars pour préjudice moral et professionnel.

Viol en 1996

Elizabeth Jean Carroll a été journaliste et chroniqueuse pour l’édition américaine du magazine Elle et a accusé en 2019 Donald Trump de l’avoir violée en 1996 dans une cabine d’essayage d’un grand magasin new-yorkais. Vendredi soir, elle est sortie rayonnante du palais de justice de Manhattan, entourée de ses proches, au milieu d’une forêt de photographes. Elle a salué dans un communiqué «une grande victoire pour chaque femme qui se relève après avoir été renversée et une énorme défaite pour chaque petite brute qui tentait de la maintenir à terre». Au procès, elle avait demandé que la justice rétablisse sa «réputation».

Sur la foi d’une autre plainte au civil en 2022 pour viol et diffamation, elle avait déjà, en mai, fait reconnaître Donald Trump responsable d’agression sexuelle en 1996 et de propos diffamatoires tenus sur cette affaire en 2022. Le magnat avait été alors condamné à lui verser 5 millions de dollars, ce qui porte à 88 millions la somme qu’il devra débourser après ces deux procès.

La dernière procédure judiciaire, uniquement pour diffamation, découle d’une première plainte civile en 2019. Le procès s’était ouvert le 16 janvier dans une ambiance électrique en présence le plus souvent de l’ex-locataire de la Maison Blanche, qui rêve d’y retourner, fort de ses victoires aux primaires républicaines des Etats de l’Iowa et du New Hampshire.

«Il ment, il diffame»

A peine avaient commencé les plaidoiries vendredi, que le tempétueux homme d’affaires et populiste s’était soudainement levé de sa chaise et avait bondi hors de la salle d’audience. Il a ensuite fait des allers-retours entre le prétoire et les couloirs du palais de justice. L’avocate d’E. Jean Carroll, Roberta Kaplan, (sans lien de parenté avec le juge Lewis Kaplan), venait de dire que l’ex-président avait «passé tout le procès à diffamer» sa cliente. «L’homme qui a agressé sexuellement [Carroll] fait ce qu’il veut : il ment, il diffame», avait tonné l’avocate pour qui le septuagénaire «continue de lui faire du mal sur sa puissante plateforme», le réseau Truth Social aux dizaines de millions d’abonnés.

De fait, Trump a posté de mercredi à vendredi une soixantaine de messages accusant une nouvelle fois Carroll d’avoir monté «une FAUSSE histoire à la Monica Lewinsky» – du nom du scandale de la stagiaire de la Maison Blanche qui avait failli emporter le président Bill Clinton à la fin des années 90 – et de «chercher à EXTORQUER» de l’argent. Il l’a encore traitée de «tarée» à l’«histoire bidon» qu’il n’a «jamais vue de [sa] vie». Durant la procédure en 2022, il avait qualifié l’autrice de «malade».

Jeudi, l’ex-chef d’Etat s’était brièvement défendu au procès, mais sa liberté de parole était strictement limitée pour éviter tout dérapage. «Elle a dit quelque chose que j’ai considéré comme faux», avait simplement répondu Trump à propos des premières accusations de viol lancées par Carroll dans un livre en 2019 et de sa plainte la même année. Le juge Lewis Kaplan, qui avait présidé le procès de 2023, avait ordonné que celui-ci ne porte que sur les propos diffamatoires de Donald Trump, et pas sur les accusations de viol. En plus de cette affaire, quatre autres procès au pénal attendent l’ancien président des Etats-Unis.