L’arroseur trempé. La nouvelle hausse des droits de douane sur l’automobile trompettée par Donald Trump mercredi 26 mars n’inquiète pas que les concurrents internationaux des Etats-Unis. Son médiatique allié Elon Musk, qui a dépensé tant et plus pour la campagne présidentielle du républicain et occupe aujourd’hui une place stratégique dans son administration, a verbalisé cette nuit ce qui inquiétait déjà à bas bruit son entreprise Tesla depuis quelques semaines : «Pour être clair, cela affectera le prix des pièces détachées des voitures Tesla qui viennent d’autres pays. L’effet sur les coûts n’est pas négligeable.»
Quelques mots sur X auxquels se sont ajoutés ceux de General Motors, Ford et Stellantis. Les trois grands constructeurs automobiles américains, qui exercent une pression continue sur le gouvernement américain sur le dossier, ont jugé «crucial» que ces droits de douane ne fassent pas «monter les prix pour les consommateurs». Ces derniers ont annoncé «continuer à travailler» avec le gouvernement mais demandent que soit préservée la «compétitivité» de la production automobile «nord-américaine», intégrant donc le Canada et le Mexique. Une inquiétude qui semble prématurée au regard des exemptions qui pourraient concerner une partie des pièces utilisées par les constructeurs automobiles qui assemblent les véhicules aux Etats-Unis.
Ces alertes succèdent à une série de déclarations venant des quatre coins de la planète pour déplorer les 25% de droits de douanes supplémentaires annoncés par le président américain sur «toutes les voitures qui ne sont pas fabriquées aux Etats-Unis», à compter du 2 avril. Un taux qui vient s’ajouter à celui jusque là appliqué de 2,5%. «Nous allons faire payer les pays qui font des affaires dans notre pays et prennent notre richesse», a justifié le magnat.
Levée de boucliers internationale
Le Premier ministre canadien, Mark Carney, a dénoncé une «attaque directe contre les travailleurs» canadiens, assurant que «nous [les] défendrons, nous défendrons nos industries, nous défendrons notre pays».
Au Japon, où Toyota a vu son action chuter en Bourse et dont l’automobile représente près d’un tiers des exportations vers les Etats-Unis, le Premier ministre Shigeru Ishiba a averti envisager des mesures de rétorsion. Le porte-parole du gouvernement a mis en garde contre l’«impact considérable» de l’offensive douanière américaine sur les relations économiques nippo-américaines mais aussi «sur l’économie mondiale et le système commercial multilatéral». En visite au Japon, le président brésilien Lula a assuré que son pays «ne pouvait pas rester sans rien faire».
Du côté de l’UE, Ursula von der Leyen a indiqué regretter «profondément la décision américaine», ajoutant que l’UE «continuera à chercher des solutions négociées» avec les Etats-Unis. La présidente de la Commission européenne, qui a annoncé reporter de deux semaines, à la mi-avril, la taxe à 25% des produits américains en réponse aux taxes du même niveau décidées par Donald Trump sur l’acier et l’aluminium, a précisé que l’UE allait «évaluer cette annonce». «Comme je l’ai déjà dit, les droits de douane sont des taxes, mauvaises pour les affaires, pires pour les consommateurs, tant aux Etats-Unis que dans l’Union européenne».
L’inquiétude a évidemment gagné les constructeurs de toute la planète. Les Britanniques ont jugé l’annonce «décevante» et appelé à «explorer les moyens de créer des opportunités pour les constructeurs britanniques et américains». Les Allemands ont de leur côté vu ce supplément tarifaire comme un «signal fatal», plaidant pour que les Etats-Unis et l’UE entrent rapidement en négociations pour trouver une «approche plus équilibrée».
La Chine exemptée ?
La Commission européenne avait déjà annoncé le report de deux semaines, à mi-avril, l’entrée en vigueur de ses contre-mesures visant des produits américains en réponse aux taxes de 25% décidées par Donald Trump sur l’acier et l’aluminium, afin de donner davantage de temps à une solution négociée. Des négociations qui se feront sous pression, Donald Trump ayant menacé l’Union européenne et le Canada de droits de douanes supplémentaires s’ils se coordonnent au détriment des Etats-Unis pour riposter à la guerre commerciale lancée par Washington.
Seule exception à cette frénésie tarifaire, les possibilités de concessions faites à la Chine. Le président américain s’est en effet montré ouvert à une exemption s’agissant de Pékin, en échange d’un accord sur TikTok. Le réseau social chinois est menacé d’interdiction aux Etats-Unis, à moins que sa maison mère, ByteDance, n’accepte de céder ses activités américaines. Pékin a justement réagi à ces nouvelles annonces en estimant qu’il n’y avait «aucun gagnant dans une guerre commerciale» et a refusé l’offre américaine. «Concernant la question de TikTok, la Chine a exprimé sa position à plusieurs reprises. La position de la Chine contre l’imposition de droits de douane supplémentaires est également cohérente et claire», a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
Mise à jour à 9h01 avec les réactions de la Chine et des constructeurs allemands et britanniques.