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«Nouvelle internationale réactionnaire» de Musk, «pas de naïveté» sur la Syrie, guerre en Ukraine… Les vérités de Macron face aux ambassadeurs

Dans son discours aux ambassadeurs ce lundi 6 janvier à l’Elysée, le Président a vivement critiqué le comportement du milliardaire américain, patron du réseau social X, qui enchaîne les ingérences dans plusieurs pays européens. Il a néanmoins rappelé les liens cordiaux qui lient la France et les Etats-Unis.
Emmanuel Macron à l'Elysée ce lundi 6 janvier 2025. ( Aurelien Morissard /AFP)
publié le 6 janvier 2025 à 12h36
(mis à jour le 6 janvier 2025 à 15h26)

Pour sa première prise de parole officielle de l’année 2025, le président de la République Emmanuel Macron a abordé de nombreux sujets internationaux au cours de la Conférence des ambassadrices et ambassadeurs, ce lundi 6 janvier à l’Elysée. De l’Ukraine à Elon Musk en passant par la Syrie… Tour d’horizon.

Un «en même temps» sur le duo Trump-Musk

Sur le binôme formé par Donald Trump et Elon Musk, Emmanuel Macron joue sur les deux tableaux. Ce lundi, le chef de l’Etat s’en est pris au nouvel homme fort des Etats-Unis, Elon Musk, sans le nommer. «Voilà dix ans, si on nous avait dit que le propriétaire d’un des plus grands réseaux sociaux du monde soutiendrait une nouvelle internationale réactionnaire et interviendrait directement dans les élections, y compris en Allemagne, qui l’aurait imaginé ?» a lancé le Président devant les ambassadeurs français, en référence au soutien continu du milliardaire américain au parti d’extrême droite allemand, AfD.

Dans le même temps, Emmanuel Macron a lancé un appel à Donald Trump, qui sera investi président des Etats-Unis le 20 janvier. Le futur chef d’Etat américain «sait qu’il a en France un allié solide, un allié qu’il ne mésestime pas», a lancé le président de la République, un mois après leur rencontre à l’Elysée, à l’occasion de la réouverture de la cathédrale de Notre-Dame. Ce même futur chef d’Etat américain qui compte nommer Elon Musk à la tête d’un ministère nouvellement créé de l’«efficacité gouvernementale», conjointement avec l’homme d’affaires républicain Vivek Ramaswamy… «Si on décide d’être faible et défaitiste, il y a peu de chances d’être respecté par les Etats-Unis d’Amérique du président Trump», a tout de même prévenu Emmanuel Macron.

«Nous devons regarder sans naïveté le changement de régime en Syrie»

Emmanuel Macron est également revenu sur la chute de Bachar al-Assad. Il a appelé ce lundi à «regarder sans naïveté le changement de régime en Syrie». La France accompagnera «dans la durée» la transition en faveur «d’une Syrie souveraine, libre et respectueuse de sa pluralité ethnique, politique et confessionnelle», a-t-il affirmé aux ambassadeurs réunis à Paris, s’engageant à rester «fidèle» aux «combattants de la liberté, comme les Kurdes», qui combattent le terrorisme et notamment l’organisation jihadiste Etat islamique. Et de promettre qu’il ne les abandonnera pas.

L’Iran, «principal défi stratégique et sécuritaire» au Moyen-Orient

Côté Moyen-Orient, Emmanuel Macron a estimé ce lundi que l’Iran constituait le «principal défi stratégique et sécuritaire». «L’accélération de son programme nucléaire nous amène tout près du point de rupture», a averti le Président. Macron a en outre dénoncé l’implication de Téhéran «dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine», son «soutien aux groupes dangereux sur tous les terrains de confrontation au Moyen-Orient», ou encore «ses tentatives de déploiement en Afrique». «Dans ce contexte, la question iranienne est sans doute l’une des principales sur lesquelles nous allons réengager le dialogue avec la nouvelle administration américaine», a-t-il conclu.

Pour Macron, les Ukrainiens «ont à mener des discussions réalistes sur les questions territoriales»

Sur le front ukrainien, Macron a affirmé que Kyiv allait devoir «mener des discussions réalistes sur les questions territoriales» pour trouver un règlement au conflit – provoqué par l’invasion russe en 2022 – dans un contexte défavorable aux Ukrainiens sur le terrain. «Eux seuls peuvent les conduire», insiste le chef de l’Etat. Les Européens devront néanmoins «construire des garanties de sécurité» pour le pays en guerre contre Moscou, a estimé le locataire de l’Elysée. Et d’en appeler de nouveau à Washington : «Les Etats-Unis d’Amérique ont à nous aider pour changer la nature de la situation et convaincre la Russie de venir à la table des négociations.»

Macron en a également profité pour faire passer un autre message à Donald Trump. «Le nouveau président américain sait lui-même que les Etats-Unis n’ont aucune chance de gagner quoi que ce soit si l’Ukraine perd» et une «capitulation de l’Ukraine ne saurait être bonne pour les Européens et les Américains», a déclaré le président français, estimant que la «crédibilité» des Occidentaux serait «battue en brèche» s’ils acceptaient de «transiger» en raison d’une «fatigue» du conflit. Selon lui, il n’y aura «pas de solution rapide et facile en Ukraine».

Un «risque très important» de «régression» de l’agenda sur le climat

Emmanuel Macron a tout de même souhaité mettre en garde contre un «risque très important» de «régression» dans l’effort collectif pour la protection de l’environnement et la lutte contre le réchauffement climatique avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche. «A la fois le président Trump menace d’une sortie de ces accords [environnementaux] et reprend de manière décomplexée une production massive d’énergies fossiles», a-t-il relevé devant les ambassadeurs français réunis à l’Elysée.

Sur la défense européenne, «il faut aller beaucoup plus vite et beaucoup plus fort»

Concernant la défense européenne, les Etats membres doivent aller «beaucoup plus vite et beaucoup plus fort» pour renforcer leur industrie de défense face à la montée des menaces, affirme le chef de l’Etat. «La question est de savoir si les Européens veulent, pour les vingt ans qui viennent, produire ce qui sera nécessaire à leur sécurité ou pas» car «si nous dépendons de la base industrielle et technologique de défense américaine, alors nous aurons de cruels dilemmes et des dépendances stratégiques coupables», a-t-il insisté.

Antiterrorisme en Afrique : «on a oublié de nous dire merci»

Si la France a eu «raison» d’intervenir militairement en Afrique «contre le terrorisme depuis 2013», les dirigeants africains ont «oublié de nous dire merci», a taclé également ce lundi le Président, estimant qu’«aucun d’entre eux ne serait aujourd’hui avec un pays souverain si l’armée française ne s’était pas déployée». «C’est pas grave, ça viendra avec le temps», a ironisé Emmanuel Macron, avant de plaider : «Non, la France n’est pas en recul en Afrique, elle est simplement lucide, elle se réorganise

Détention de l’écrivain Boualem Sansal : l’Algérie se «déshonore»

Face aux ambassadeurs, le Président a évidemment mentionné le cas de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal. Pour Macron, l’Algérie se «déshonore» en ne libérant pas l’auteur de 80 ans, arrêté à la mi-novembre à Alger. «L’Algérie que nous aimons tant et avec laquelle nous partageons tant d’enfants et tant d’histoires entre dans une histoire qui la déshonore, à empêcher un homme gravement malade de se soigner. Ce n’est pas à la hauteur de ce qu’elle est», a-t-il tranché. «Et nous qui aimons le peuple algérien et son histoire, je demande instamment à son gouvernement de libérer Boualem Sansal», a-t-il lancé.

«Charlie Hebdo» : Macron affirme qu’il ne doit y avoir aucun «relâchement», aucun «répit» dans la lutte contre le terrorisme

A la veille du dixième anniversaire de l’attentat islamiste qui a décimé la rédaction de l’hebdomadaire Charlie Hebdo,
le président Macron a appelé à poursuivre sans «relâchement», sans «répit», la lutte contre le terrorisme. «Nous savons que le terrorisme est un risque qui demeure prégnant dans nos sociétés et qui implique qu’il n’y ait aucun relâchement et une vigilance collective», a-t-il dit. «Il ne faut aucun répit dans la lutte contre le terrorisme», a-t-il martelé.

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