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Attentats

En Colombie, l’armée dans les rues après deux attentats en une journée

Deux attaques perpétrées par des groupes armés ont fait 18 morts, jeudi, et poussé le gouvernement à déployer les forces militaires. Une recrudescence spectaculaire de la violence qui réveille les traumatismes du passé.
Sur le site de l'attaque de Cali, le 21 août 2025. (Iusef Samir Rojas/AFP)
publié aujourd'hui à 12h18

Un véhicule piégé qui explose dans une ville colombienne, cela ressemble à un mauvais souvenir des années 1990. Mais voilà que les plaies du passé violent de la Colombie se rouvrent brusquement. Ce jeudi 21 août, deux attaques attribuées à des groupes armés ont fait au moins 18 morts et des dizaines de blessés, quelques jours seulement après la mort d’un candidat à la présidentielle, le conservateur Miguel Uribe, visé en juin par un attentat.

La première rappelle les attentats d’il y a trente ans, attribués au cartel de Medellín de Pablo Escobar. Un camion piégé a explosé dans l’après-midi près d’une base aérienne de Cali, la troisième ville du pays, dans le sud-ouest. Au moins six personnes sont mortes et 60 autres ont été blessées, selon les autorités. Les Colombiens ont regardé, médusés, les images retransmises rapidement sur les réseaux sociaux où l’on voit plusieurs personnes au sol, et les secours qui s’activent pour les prendre en charge face à un camion en flammes au milieu d’autres voitures aux vitres brisées.

La seconde, arrivée plus tôt, dans la matinée, est plus moderne. Un drone s’est attaqué à un hélicoptère de la police en pleine opération antidrogue, à quelque 150 kilomètres de Medellín, plus au nord. Suivi d’affrontements qu’ont fait au moins douze morts parmi les forces de l’ordre. Selon un responsable sécuritaire, les assaillants ont «harcelé» des policiers qui supervisaient un groupe chargé d’éradiquer les plantations de coca.

Narcos ou guérilleros ?

Dans les deux cas, les autorités ont rapidement accusé différentes guérillas. A Cali, après que le maire, Alejandro Eder, a dénoncé une «attaque narcoterroriste» et demandé une «militarisation» de la ville, le ministre de la Défense, Pedro Sánchez, a accusé l’organisation Etat-Major Central (EMC) d’être responsable de cet «attentat terroriste injustifiable contre la population civile de Cali». Il s’agit d’un groupe dissident de l’ex-guérilla des Farc (Forces armées révolutionnaires de Colombie), qui a signé un accord de paix historique avec le gouvernement colombien en 2016.

Le président, Gustavo Petro, lui-même ancien guérillero qui avait promis d’offrir à la Colombie une «paix totale», a assuré que l’attentat était une «réaction» à des opérations menées par les autorités près d’une zone d’intense culture de coca. «Nous affrontons une mafia internationale, avec des bandes armées, a-t-il poursuivi. Le coup porté à la population de Cali est sans aucun doute profond, brutal, terrifiant.» L’attaque du nord est quant à elle attribuée au groupe de guérilleros Calarca, lui-même issu d’une scission de l’EMC.

Deux hommes arrêtés à Cali

Les autorités ont rapidement réagi en déployant un important dispositif militaire, en particulier à Cali où le maire a annoncé l’interdiction de circulation des camions dans la ville et offert 10 000 dollars (8 600 euros) de récompense pour toute information. Le commandant des forces armées, Hugo López, a annoncé que «des avions de l’armée de l’air […] effectuent des missions de reconnaissance et de surveillance dans la zone» proche de la base militaire visée. Ce général a par ailleurs indiqué que l’armée avait «déployé» dans ce secteur «toutes ses troupes». Par ailleurs, deux hommes ont été arrêtés. Selon le parquet, ils «auraient participé à l’activation des engins explosifs» sur ce site.

Ces deux attaques, le même jour, signent un peu plus l’échec de pourparlers entre le gouvernement et les différents groupes armés. Et s’inscrivent dans une inquiétante résurgence de la violence armée en Colombie. L’année 2025 avait commencé par des affrontements entre deux guérillas rivales, à la frontière vénézuélienne, pour le contrôle d’une zone importante pour le trafic de cocaïne. Désormais, les civils sont également touchés. Une attaque avait déjà eu lieu en juin, aussi attribuée à l’EMC, faisant sept morts dans le sud-ouest du pays. Et puis il y a eu cet attentat contre Miguel Uribe, annoncé comme le favori de la droite pour la présidentielle qui se tiendra dans un an, dont on ne connaît toujours pas les auteurs.