«Le système fonctionne exactement comme il est censé le faire […] pour protéger la suprématie blanche». Le verdict ne passe pas pour les activistes du mouvement antiraciste Black Lives Matter. Ils réagissent sur Twitter à l’acquittement du jeune Américain Kyle Rittenhouse, qui a tué par balle deux personnes et blessé une troisième en marge de manifestations antiracistes en août 2020 à Kenosha, dans le Wisconsin.
Reminder: the system is working exactly as it is meant to. The system was always meant to protect and uphold white supremacy.
— Black Lives Matter (@Blklivesmatter) November 19, 2021
Les douze jurés d’un tribunal de l’Etat du Wisconsin l’ont déclaré «non coupable» des cinq chefs d’accusation qui pesaient sur lui, dont meurtres, au quatrième jour de leurs délibérations. Le jeune homme de 18 ans, qui encourait la réclusion à perpétuité, s’est effondré en larmes à la lecture du verdict, avant de quitter rapidement la salle d’audience.
«Touriste du chaos»
Le 23 août 2020, Kenosha, ville de la région des Grands Lacs, s’était enflammée après une bavure policière contre un Afro-Américain. Alors âgé de 17 ans, Kyle Rittenhouse s’était équipé d’un fusil semi-automatique et avait rejoint des groupes armés venus «protéger» les commerces. Dans des circonstances confuses, il avait ouvert le feu, tuant deux hommes et en blessant un troisième.
«Je n’ai rien fait de mal, je me suis juste défendu», a-t-il plaidé, en pleurs, lors de son procès, assurant avoir tiré après avoir été pris en chasse et attaqué par ces trois hommes - tous blancs comme lui. L’accusé était «un touriste du chaos» qui «cherchait l’excitation» et s’est «volontairement et en toute connaissance de cause mis dans une situation dangereuse», a rétorqué le procureur Thomas Binger dans son réquisitoire.
Kyle Rittenhouse a comparu libre, des soutiens ayant payé les deux millions de dollars de caution. Le jeune homme est en effet devenu une égérie dans certains milieux de droite, pour qui la grande mobilisation contre les violences policières de l’été 2020 était l’œuvre d’«antifas» ou «d’anarchistes». A l’inverse, à gauche, il incarne les excès de la culture des armes et du droit à l’auto-défense.
Un procès taxé de «déni de justice»
La ville de Kenosha était devenue un symbole des fractures de l’Amérique. Pendant la dernière campagne présidentielle, les candidats Trump et Biden s’y étaient tous deux rendus, l’un pour blâmer les manifestants antiracistes, l’autre pour se poser en rassembleur. Le procès a lui aussi été symbolique des débats internes à la société américaine sur les armes à feu, le droit à l’autodéfense et le mouvement antiraciste Black Lives Matter. Les commentaires sur verdict sont aux antipodes.
Le maire démocrate de New York Bill de Blasio a ainsi fustigé un «déni de justice», tandis que l’élue républicaine du Congrès Mary Miller tweetait : «Dieu bénisse l’Amérique». Shaadie Ali, un représentant de la puissante organisation de défense des droits civiques ACLU, le verdict «illustre le besoin urgent de réformes de la justice et de notre système pénal, qui est cassé». Pour éviter d’éventuels débordements, le gouverneur du Wisconsin a demandé à 500 soldats de la Garde nationale de se tenir prêts à intervenir à Kenosha. Joe Biden a lancé un appel au calme après l’annonce de la décision.
Le verdict «a plongé de nombreux Américains dans la colère et l’inquiétude, moi y compris», a-t-il écrit dans un communiqué, avant toutefois de préciser: «J’appelle tout le monde à exprimer ses opinions pacifiquement, dans le respect de la loi. »