Quand John Fetterman a hissé à pas lourds sa silhouette de géant au-dessus de la foule monstre d’un meeting à Pittsburgh, le 5 novembre, il a commencé par s’excuser d’être là – comme presque chaque fois qu’il s’exprimait en public ces derniers mois, après l’AVC qui a manqué de le tuer en mai dernier. «Si vous devez parler alors que vous remettez à peine d’une attaque, mon conseil de pro, c’est d’éviter à avoir à passer juste avant Barack Obama», a-t-il lancé, pour la blague, en ouverture de son adresse. Un discours qu’il a fait bref, à l’os, à trois jours du terme d’une campagne dont ce moment semblait à bien des égards, malgré les vibrants éloges tressés par Obama dans la foulée, s’apparenter à l’avant-dernière station d’un long calvaire surmédiatisé. Mais le dénouement fut heureux : mardi soir, John Fetterman est remonté sur scène à Pittsburgh, l’air délivré, sans mot d’excuse cette fois, en sénateur fraîchement élu de l’Etat de Pennsylvanie et seul champion démocrate à être parvenu cette année à faire basculer un siège jusque-là républicain à la chambre haute.
Un néo-sénateur attifé ce soir-là, comme toujours, d’un sweat-shirt à capuche et d’un short : l’inflexible uniforme qui, avec sa stature de colosse (2,03 mètres et quelque 150 kilos), son crâne rasé, son bouc poivre-et-sel, sa peau très encrée et, accessoirement, un remarquable itinéraire d’activisme progressiste dans la Pennsylvanie la plus prolétaire, épicent la matière d’une aura hors norme. Par-delà l’enje