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Libération
Impeachment

Etats-Unis : les républicains veulent destituer le ministre de Biden chargé de l’immigration

Adoptée lors d’un vote serré à 214 voix contre 213, la mise en accusation des républicains vise à destituer Alejandro Mayorkas, critiqué pour sa gestion de la crise migratoire à la frontière avec le Mexique.
Alejandro Mayorkas arrive pour une conférence de presse sur la sécurité avant le Super Bowl, à Las Vegas, aux Etats-Unis, le 7 février 2024. (Patrick T.Fallon /AFP)
publié le 14 février 2024 à 11h37

C’est la première fois en près de 150 ans que le Congrès décide d’une telle sanction contre un ministre. Mardi 13 février, les républicains à la Chambre américaine des représentants – la chambre basse du Congrès – ont mis en accusation Alejandro Mayorkas, le ministre du président Joe Biden chargé de l’immigration, lors de la première étape d’une procédure d’«impeachment» adoptée à 214 voix contre 213. La Constitution prévoit que le Congrès peut destituer le président, un ministre, ou des juges fédéraux en cas de «trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs». Dans le cas présent, les républicains – pour la plupart proches de l’ancien président Donald Trump à la rhétorique anti-immigration – reprochent au ministre d’avoir provoqué une crise à la frontière entre les Etats-Unis et le Mexique. Ils considèrent que le président démocrate, Joe Biden, a laissé le pays se faire «envahir», prenant pour exemple le chiffre record de migrants arrêtés à la frontière – 302 000 en décembre dernier.

Joe Biden a rapidement réagi, en dénonçant, dans un communiqué, un «acte flagrant de politique politicienne qui a pris pour cible un honorable serviteur de l’Etat». «Au lieu d’organiser des mascarades de ce genre, les républicains qui se préoccupent réellement de la frontière devraient demander au Congrès davantage de ressources et de renforcer la sécurité aux frontières», a-t-il fustigé. A moins de neuf mois de la présidentielle, cette situation est un véritable casse-tête pour le chef d’Etat de 81 ans. L’immigration s’est imposée comme un des sujets phares de la campagne pour la présidentielle de novembre, qui opposera selon toute vraisemblance le président Joe Biden à son rival républicain Donald Trump.

Le principal intéressé, Alejandro Mayorkas, a lui maintes fois rejeté les accusations des républicains, leur reprochant de «gaspiller du temps précieux et l’argent des contribuables». Il y a une semaine, les conservateurs avaient déjà tenté de le mettre en accusation, mais avaient manqué leur coup d’une poignée de voix lors d’un vote humiliant. «C’est l’architecte en chef de la catastrophe», avait accusé plus tôt Mike Johnson, le chef républicain de la Chambre des représentants, qui a tranché sur le sort du ministre de 64 ans en début de soirée.

Un procès à venir au Sénat

Le 2 février, l’état-major républicain pensait avoir un nombre suffisant de voix pour remporter ce vote, mais avait été pris de court par l’arrivée surprise dans l’hémicycle d’un élu démocrate, Al Green, pourtant en convalescence en raison d’une opération à l’abdomen. L’élu de l’Arizona avait déboulé en fauteuil roulant en plein vote, pieds nus et en tenue d’hôpital, faisant finalement pencher la balance en faveur des démocrates. Un événement presque miraculeux qui a fait faute aux démocrates mardi. Trois parlementaires républicains avaient pourtant fait savoir avant le scrutin qu’ils voteraient contre, estimant la sanction largement disproportionnée. Leur groupe ne pouvait pas se permettre une défection de plus, en raison de de la majorité extrêmement mince qu’ils possèdent à la Chambre des représentants.

Leur pari réussi, place maintenant à la deuxième étape de la procédure d’«impeachment» : le Sénat, chambre haute du Congrès, devra donner le verdict final au cours d’un procès. Au terme des débats, les sénateurs procéderont à un vote qui nécessite une majorité de deux tiers pour condamner Alejandro Mayorkas – auquel cas la destitution est automatique et sans appel. Dans le cas contraire, il sera acquitté. Compte tenu de la majorité démocrate du Sénat, la destitution du ministre de l’Immigration reste cependant largement improbable.

La dernière inculpation d’un ministre par le Congrès remonte à… 1876. Le ministre de la Guerre William Belknap, accusé de corruption, avait démissionné avant la fin de la procédure de destitution.