C’est un combat aux armes inégales. Une lutte judiciaire de longue haleine, déclenchée par un homme que rien ne prédestinait à marquer l’histoire de la bataille climatique. Saúl Luciano Lliuya, un paysan andin de 41 ans, possède un modeste pâturage d’un demi-hectare près de la ville de Huaraz, au pied des sommets enneigés du Palcaraju (6 274 m) et du Pucaranra (6 156 m), dans le nord-est du Pérou. Des terres sur lesquelles il cultive pommes de terre, quinoa ou maïs, mais qui pourraient un jour se retrouver englouties par les eaux du lac Palcacocha, inexorablement gonflé par la fonte des glaces.
La bataille de Saúl Luciano Lliuya débute en 2015. Après avoir rencontré, l’année précédente, lors de la COP20 organisée à Lima, des membres de l’ONG allemande de défense de l’environnement GermanWatch, qui lui apportent soutien moral et appui juridique, le père de deux enfants attaque le groupe RWE devant la justice allemande. Il accuse le géant énergétique de favoriser, par ses émissions polluantes, la fonte des glaciers qui surplombent le lac Palcacocha, situé dans la cordillère des Andes. Débouté en première instance en 2016, Saúl Luciano Lliuya fait appel en 2017. Cinq ans plus tard, après des retards dus à la pandémie de Covid-19, une délégation allemande composée de neuf juges et experts vient de se rendre sur place, au Pérou, pour étudier le bien-fondé de