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Crise

Haïti : le personnel «non essentiel» de l’ONU évacué, un pont aérien mis en place avec la République dominicaine

Face aux violences et à la crise consécutive à la démission du Premier ministre haïtien, les Nations-Unies ont annoncé mercredi 13 mars retirer une partie de leurs 1 500 employés à Haïti, mais renforcer les livraisons humanitaires.
Des personnes passent avec inquiétude à Port-au-Prince, Haïti, le 12 mars 2024. (Louis Guerinault/Anadolu. AFP)
publié le 13 mars 2024 à 21h47
(mis à jour le 14 mars 2024 à 6h28)

La crise politique couve plus que jamais à Haïti. Deux jours après la démission du Premier ministre Ariel Henry, et dans la foulée de nombreuses ambassades occidentales, l’ONU a annoncé ce mercredi 13 mars retirer son personnel «non essentiel» du pays. Mais l’entité, qui compte actuellement quelque 1 500 employés dans le pays, dont plus de 250 employés internationaux, «ne quitte pas Haïti», a-t-elle insisté dans un communiqué, précisant que le personnel en charge «des activités vitales» allait poursuivre son travail.

Dans la soirée, les Nations unies ont ensuite annoncé la prochaine mise en place d’un «pont aérien» entre Haïti et la République dominicaine voisine pour permettre «la fluidité de l’aide et les mouvements de son personnel» vers le pays en crise. L’ONU prévoit aussi l’arrivée d’autres membres de personnel «de crise».

En parallèle, les partis politiques et personnalités du territoire s’efforcent de s’accorder sur la composition d’autorités de transition, afin de tenter de rétablir un semblant de stabilité dans ce petit pays pauvre des Caraïbes. Sans élection depuis 2016, il est toujours sans chef d’Etat. Près de 362 000 personnes sont actuellement déplacées en Haïti, selon l’Organisation internationale des migrations. Face à la situation, l’Union européenne a annoncé avoir accordé une aide humanitaire de 20 millions d’euros.

A Port-au-Prince, théâtre d’une flambée de violences ces dernières semaines, les activités commerciales ont tout de même repris ce mercredi. Des transports en commun étaient visibles dans les rues et certains bureaux de l’administration publique ont rouvert leurs portes après plus de deux semaines de fermeture. En revanche les établissements scolaires restent fermés, tout comme l’aéroport international.

Si plusieurs habitants de la capitale ont salué l’annonce de la démission du Premier ministre, certains s’interrogent sur la place à donner aux gangs. Lesquels contrôlent des pans entiers du pays, notamment 80 % de Port-au-Prince, et sont accusés de multiples exactions.

Difficiles négociations

Le Kenya a annoncé mardi suspendre l’envoi prévu de policiers en Haïti dans le cadre d’une mission internationale soutenue par l’ONU. Le président kényan a cependant ajouté ce mercredi que le déploiement aurait lieu «dès que le conseil présidentiel sera (it) en place». Ce conseil présidentiel transitoire a été demandé lundi, peu après l’annonce de la démission d’Ariel Henry, par la Communauté des Caraïbes (Caricom), l’ONU et plusieurs pays comme les Etats-Unis et la France.

Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, qui s’est entretenu par téléphone avec le président kényan William Ruto, a exprimé l’espoir mercredi que ce nouveau conseil haïtien puisse être formé «dans les prochains jours». Ce conseil doit être formé de sept membres votants représentant les principales forces politiques en Haïti et le secteur privé. Deux observateurs sans droit de vote doivent en outre porter la voix de la société civile et de la communauté religieuse.

Mais les négociations sont ardues, et la plupart des partis indiquent être encore en pourparlers. «Nous parlons de partis politiques qui n’ont pas pu se mettre d’accord ces quelques dernières années», a souligné Ivan Briscoe, directeur du programme pour l’Amérique latine et les Caraïbes à l’International Crisis Group. Maintenant qu’Ariel Henry est sur le départ, «peut-être se tourneront-ils vers l’intérêt national et laisseront-ils de côté les intérêts de leurs partis pendant un certain temps, jusqu’aux élections. Mais il y a évidemment des inquiétudes sur leur capacité à se mettre d’accord». A priori, les gangs qui ravagent Haïti sont exclus de la transition politique à mettre en œuvre. Mais du fait de leur puissance de feu, ils risquent de peser de facto sur la nouvelle équation politique.

Mise à jour : ce jeudi 14 mars à 6h28, avec l’ajout de l’annonce du pont aérien vers la République dominicaine.