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Libération
Campus sous tension

Guerre Israël-Hamas : Harvard maintient sa présidente et espère la fin de la polémique «politique» sur l’antisémitisme

Etudiants et professeurs de l’université américaine espèrent que le maintien en poste de leur présidente, acté mardi 12 décembre, éteindra la polémique «politique» sur des accusations d’antisémitisme au sein de l’institution secouée par les conséquences de la guerre entre Israël et le Hamas.

Le Dr Claudine Gay, présidente de l'Université Harvard, le 5 décembre. (Kevin Dietsch/AFP)
Publié le 13/12/2023 à 9h10

La mobilisation en soutien de la présidente de l’université Harvard aura porté ses fruits. Claudine Gay, 53 ans, a été maintenue mardi 12 décembre dans ses fonctions malgré les «pressions politiques» aux Etats-Unis et en Israël, après ses propos jugés ambigus sur la lutte contre l’antisémitisme sur le campus, secoué par les répercussions du conflit meurtrier à Gaza.

«En tant que membres de la Corporation de Harvard, nous réaffirmons ce jour notre soutien à la poursuite du mandat de direction de la présidente (Claudine) Gay», a ainsi déclaré la plus haute instance de la prestigieuse université, fondée il y a 368 ans à Cambridge, dans l’agglomération de Boston. Après un conseil d’administration extraordinaire lundi soir, l’instance a exprimé sa «confiance dans le fait que la présidente Gay est la bonne dirigeante pour aider notre communauté (universitaire) à traiter des très graves questions sociétales auxquelles nous sommes confrontés».

Propos ambigus

La polémique a éclaté le mardi 5 décembre. Dans une ambiance tendue, Claudine Gay, devenue, en juillet la première présidente noire de l’université Harvard, et ses homologues de l’université de Pennsylvanie (UPenn) et du Massachusetts Institute of Technology (MIT), Elizabeth Magill et Sally Kornbluth, ont répondu pendant cinq heures aux questions d’élus de la Chambre des représentants.

Parmi eux, la républicaine Elise Stefanik, qui assimilait les appels à l’«intifada» d’étudiants pro-palestiniens à une exhortation au «génocide contre les juifs en Israël et dans le monde». Lorsque Elise Stefanik avait demandé si «appeler au génocide des juifs violait le règlement sur le harcèlement à Harvard, oui ou non ?», Claudine Gay avait répondu : «Cela peut, en fonction du contexte», avant d’ajouter : «Si c’est dirigé contre une personne.» La controverse provoquée par ces propos a contraint Elizabeth Magill à quitter samedi la présidence de UPenn, et 70 élus, surtout républicains, ont réclamé le départ de Claudine Gay.

«Pressions politiques»

De riches donateurs et des voix dans le camp républicain, mais aussi démocrate, ont dénoncé une flambée d’incidents antisémites sur les campus et critiqué une réponse trop faible des présidents d’universités, sur fond de critiques récurrentes des conservateurs contre les campus américains qu’ils jugent trop à gauche. En Israël, allié militaire des Etats-Unis, le Premier ministre Benyamin Nétanyahou avait dénoncé dimanche une «flambée d’antisémitisme sur les campus» américains, que le mémorial de la Shoah, Yad Vashem, a comparé à un «cancer».

Mais depuis ce week-end, près de 700 professeurs se sont opposés à travers une pétition aux appels et aux «pressions politiques» visant à obtenir la démission de Claudine Gay. Pour le professeur de sciences politiques Ryan Enos, l’un des 700 signataires de la lettre de soutien, «les conservateurs veulent faire cesser la liberté d’expression sur les campus». «Et ils ont déjà réussi dans une certaine mesure à faire taire les voix pro-palestiniennes sur les campus universitaires», a-t-il ajouté.

«La présidente Gay a présenté ses excuses pour la manière dont elle a témoigné devant le Congrès et s’est engagée à redoubler les efforts de l’université pour combattre l’antisémitisme», a souligné mardi la Corporation de Harvard. Rabbin et dirigeant du groupe d’étudiants juifs Harvard Hillel, Getzel Davis a réagi au maintien en poste de la présidente de l’université : «Le plus important pour les étudiants juifs d’Harvard, c’est que la culture change, et que nous ayons une administration qui les soutienne, qui nomme, dénonce et lutte contre l’antisémitisme partout où il survient».