Le moment est bien choisi : au moins 8 000 migrants se sont mis en route dimanche 24 décembre pour traverser en groupe le Mexique et rejoindre la frontière des Etats-Unis. Leur initiative coïncide avec la rencontre, mercredi 27 décembre à Mexico, entre le président Andrés Manuel López Obrador et une délégation emmenée par le secrétaire d’Etat des Etats-Unis, Antony Blinken.
Le dossier migratoire est au cœur des relations entre les deux voisins. Washington demande à Mexico de contenir les arrivées de migrants qui proviennent d’Amérique centrale mais aussi de Cuba ou de Haïti, et dont le nombre ne cesse de croître. La police des frontières fait état ces dernières semaines de 10 000 passages chaque jour, soit un rythme encore plus soutenu que les mois précédents.
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L’élection américaine du 5 novembre 2024 est la toile de fond du sommet : la maîtrise des frontières et l’entrée d’immigrés clandestins sont des thèmes que les républicains ne se privent pas d’utiliser contre leurs adversaires démocrates pendant la campagne. La réunion de Mexico a été convoquée d’urgence, puisqu’elle n’a été annoncée que la semaine dernière.
Trois points de passage fermés
«Amlo» s’est engagé de longue date à renforcer les mesures pour stopper des migrants dans le sud du pays, sans toujours y parvenir. «L’accord est que nous continuions à travailler ensemble», a indiqué le président mexicain. La visite vise, selon le département d’Etat américain, à «identifier les moyens par lesquels le Mexique et les Etats-Unis vont relever les défis en matière de sécurité frontalière, notamment à travers d’actions permettant de rouvrir des points d’entrée clés sur notre frontière commune».
Ces points de passage permettent aux migrants ayant accompli des démarches de se présenter aux autorités américaines et de postuler à un statut légal. Mais la police américaine des frontières en a récemment suspendu trois, au Texas, en Arizona et en Californie, affirmant être débordée par les passages clandestins et voulant redéployer ses effectifs dans d’autres secteurs. Plus de 2,4 millions de migrants ont été interceptés à la frontière terrestre entre octobre 2022 et septembre 2023, un chiffre en hausse par rapport aux années antérieures.
La plupart des candidats au rêve américain tentent leur chance clandestinement. Avec les risques que comporte la traversée. Jeudi 21 décembre, deux migrants sont morts noyés près de la ville de Matamoros, dans une zone boueuse du Rio Grande, face à Brownsville (Texas). Ils ont été pris au piège dans la fange et les ordures que charrie le fleuve. Ils avaient choisi ce site très dangereux car il n’y avait pas d’agents de la migration mexicaine, ont expliqué des témoins à l’AFP.
Une loi ultra-répressive au Texas
De son côté la «Caravane de Noël» a quitté Tapachula, dans le Chiapas, à la frontière avec le Guatemala, dimanche 24 décembre. Elle est composée de familles qui se déplacent à pied, et les mineurs y sont nombreux. La police mexicaine et la garde nationale surveillent son avancée sans être intervenue jusqu’à mardi.
La crispation du débat aux Etats-Unis a connu une nouvelle étape le 18 décembre avec la signature par le gouverneur du Texas, le trumpiste Greg Abbott, d’une loi qui crée l’infraction d’entrée illégale, punie de six ans de prison, vingt ans en cas de récidive. Le texte, qui doit entrer en vigueur fin mars, élimine aussi le statut de «lieu refuge» que plusieurs municipalités et campus universitaires ont adopté. Les opposants comptent sur une invalidation par la cour constitutionnelle du Texas, car la loi entre dans un champ dévolu à l’Etat fédéral. Mais si elle est appliquée, elle fera du Texas l’Etat le plus répressif et inhospitalier pour les migrants.