
Reportage
«Je suis devenue activiste en pagayant sur ce fleuve» : des ados autochtones américains descendent le Klamath pour la première fois en cent ans
Ils surgissent après un mois de voyage, leur silhouette apparaissant puis disparaissant au gré de la brume qui, venue de l’océan, vient lécher le clapotis du fleuve et envelopper les kayaks, guidés par un cortège de goélands. Sur la langue de sable gris, des enfants grelottent dans leurs parures de coquilles d’ormeaux et de perles. La brise fait tinter les sabots de biche évidés ornant leurs ceintures. Au son des tambours, les pagayeurs posent enfin le pied sur la terre ferme, en Californie du Nord. Ils se regardent un moment d’un air incrédule puis, dans un hurlement de joie, se lancent vers l’océan, les drapeaux de leurs tribus à bout de bras. «Je n’aurais jamais imaginé voir ça de mon vivant», lance Sue Masten, que tout le monde appelle Tante Sue au village, en retenant pudiquement ses larmes.
En ce vendredi 11 juillet, 17 jeunes âgés de 13 à 20 ans, issus des tribus du bassin – dont les Klamaths, Yuroks, Karuks, Quartz Valley, Hoopa Valley et Warm Springs – viennent d’achever la première descente complète du fleuve Klamath depuis plus d’un siècle. Une expédition de près de 500 kilomètres possible depuis que quatre retenues hydroélectriques ont été dynamitées, dans le cadre du projet de démantèlement de barrages le plus important de l’histoire des Etats-Unis, achevé en octobre (lire ci-contre).
Rite de passage
Sur la plage de Requa, en terre Yurok, plusieurs aïeux observent la scène, assis sur des morceaux de bois flotté. Pendant des décennies, ils ont clamé le droit de ce fl