Aussi accomplie soit-elle, et elle le fut de bout en bout, l’allocution prononcée par Kamala Harris en acceptation de son investiture par la convention du Parti démocrate, jeudi 22 août, à Chicago, ne léguera peut-être pas à l’histoire de concept ou de formule fulgurante que l’on s’enivrera de revisiter dans vingt ans, tels les morceaux de bravoure signant le baptême du New Deal de Franklin Roosevelt en 1932, ou l’irruption d’un Barack Obama dans le champ de vision de l’Amérique de 2004. Mais ce discours, à la fois éloge de l’expérience américaine et invitation à «écrire le prochain grand chapitre de [cette] histoire la plus extraordinaire jamais racontée», n’avait pas besoin de cela pour accomplir en une quarantaine de minutes quelques prodiges, qui ne sauraient être que de pure rhétorique.
Celui d’abord d’asseoir pour de bon la stature présidentiable d’une figure encore largement raillée et mésestimée il y a quelques mois, dans l’ingrat costume de la vice-présidence, au point d’avoir été perçue alors comme un boulet à évincer si possible du ticket Biden-Harris 2024. Celui de renverser le rapport de force pour muer une nouvelle fois cette élection parmi «les plus importantes de la vie de [la] nation» en un référendum contre la figure, l’œuvre ravageuse et la conception autocratique du pouvoir d’un Donald Trump «au service d’un seul client, lui-même» – comme si elle,