«Vive la liberté et vive la paix». C’est avec ces mots que le président colombien, Gustavo Petro, a salué la libération de Luis Manuel Díaz, père de l’attaquant de Liverpool, Luis Díaz, jeudi 9 novembre. «Mane» avait été enlevé le 28 octobre à Barrancas, dans la région de la Guajira, située dans le nord de la Colombie à la frontière avec le Venezuela, en même temps que son épouse, Cilenis Marulanda, libérée le jour même, grâce, semble-t-il, au déploiement immédiat de la police et de l’armée. Le père du footballeur était resté aux mains des ravisseurs. Depuis treize jours, la Colombie tout entière s’inquiétait pour son sort.
L’enlèvement était même devenue quasi une affaire d’état. Car Mane Díaz était aux mains d’un groupe de l’Armée Libération Nationale (ELN), la dernière guérilla encore en exercice en Colombie et avec qui le gouvernement a entrepris des négociations de paix qui a débouché sur un cessez-le-feu bilatéral de six mois début août.
D’où le choc à l’annonce de l’enlèvement. Non seulement parce que cela mettait en péril ce processus de paix mais aussi parce que Luis Diaz est un des enfants chéris de la Colombie, issu d’une famille modeste installée dans une région longtemps abandonnée par l’Etat. En devenant footballeur et international, Diaz a accompli le rêve de milliers de jeunes Colombiens…
La séquestration des parents de Luis Diaz rappelait aussi les sombres années où les enlèvements étaient pléthore et touchaient toutes les catégories sociales. Entre 1990 et 2018 près de 50 000 personnes ont été séquestrées en Colombie, aux mains notamment de l’ex-guérilla des Farc (qui a signé un accord de paix en 2016), des groupes paramilitaires, de l’ELN, ou de groupes de délinquants, à la fois pour demander des rançons et faire pression politiquement. Les principaux dirigeants des ex-Farc ont ainsi été inculpés par la Justice transitionnelle pour plus de 21 000 enlèvements.
Ce fléau, qui n’a jamais vraiment disparu en Colombie, est de nouveau en augmentation, même s’il n’a plus rien à voir en proportion avec ces années noires. Depuis le début de l’année, le CICR a par exemple contribué à la libération de 65 otages, contre 63 en 2022, 27 en 2021 ou 21 en 2020. Tous aux mains de groupes armés illégaux.
Le commandant militaire de l’ELN, Antonio Garcia, avait reconnu il y a quelques jours que cet enlèvement était une «erreur» et avait promis d’œuvrer à la libération de Luis Manuel Diaz parce qu’il était «symbole national». Mais il n’a pas annoncé que son groupe renoncerait aux «rétentions économiques», synonyme de prises d’otages dans le jargon guérillero, déclenchant une vague d’indignation dans le pays. L’ELN détiendrait en ce moment entre 19 et 32 otages selon différentes sources proches du gouvernement.
La délégation gouvernementale chargée des négociations de paix avec l’ELN a déclaré dans un communiqué qu’elle se réjouissait de la libération de Luis Manuel Díaz mais a souligné que l’enlèvement «n’aurait jamais dû se produire».
«Le processus actuel avec l’ELN a progressé comme aucun autre jusqu’à aujourd’hui. Néanmoins, notre délégation considère que l’enlèvement de Luis Manuel Díaz a placé notre dialogue dans une situation critique et que, pour cette raison, le moment est venu de prendre des décisions pour éliminer les enlèvements, a fait savoir la déclaration. Notre délégation exige déjà et l’exigera lors de la prochaine réunion avec la délégation de l’ELN que toutes les personnes détenues par cette organisation soient libérées».
Le père de Luis Díaz a finalement été libéré grâce, aussi, à l’intervention de la conférence épiscopale et de la représentation des Nations Unies en Colombie. Jeudi, peu après l’annonce de la libération de son père, Luiz Diaz jouait contre le TFC en Ligue Europa. Liverpool a perdu mais cela n’a pas entaché la joie des Colombiens.