Menu
Libération
Liberté de la presse

La détention en Russie de la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva prolongée jusqu’au 5 juin

La reporter avait été arrêtée le 18 octobre pour ne pas s’être enregistrée en tant qu’«agent de l’étranger». Selon son média, elle est également accusée de diffusion de «fausses informations», passible de 15 ans de prison.
La journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva, au tribunal de Kazan, le 1er avril 2024. (Alexander Nemenov /AFP)
publié le 1er avril 2024 à 14h57

Un tribunal russe a prolongé ce lundi 1er avril la détention de la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva jusqu’au 5 juin. La reporter de 47 ans, qui travaille pour Radio Free Europe /Radio Liberty (RFE /RL), média financé par le Congrès américain, a été arrêtée le 18 octobre 2023 pour ne pas s’être enregistrée en tant qu’«agent de l’étranger». Selon son média, elle est également accusée de diffusion de «fausses informations», passible de 15 ans de prison.

«Les accusations portées contre Alsu sont sans fondement. Il ne s’agit pas d’une procédure légale, mais d’un stratagème politique, et Alsu et sa famille paient un prix terrible de manière injustifiée», a dénoncé dans un message le président de RFE/RL, Stephen Capus.

Selon le média américain, «c’est la première fois qu’un journaliste fait l’objet d’une procédure pénale» pour manquements liés à l’inscription au registre des «agents de l’étranger». Imposée en Russie depuis 2012, cette règle stigmatise les ONG et médias indépendants en tant qu’ennemis intérieurs, et limite leur champ d’action, notamment via des contraintes administratives et un contrôle financier très lourd.

«Urgence familiale»

Selon le site internet Tatar Inform, Alsu Kurmasheva avait été condamnée à une amende le 11 octobre pour ne pas avoir déclaré sa citoyenneté américaine aux autorités russes. Citant des sources policières anonymes, le site affirme que la journaliste travaillait notamment sur la mobilisation d’enseignants par l’armée. Pour la justice russe, elle était engagée dans «la collecte intentionnelle d’informations concernant des activités militaires» pouvant être dommageables pour «la sécurité de la Russie».

Résidant d’ordinaire à Prague, en République tchèque, avec son mari et ses deux filles adolescentes, Alsu Kurmasheva s’était rendue en Russie pour une «urgence familiale» le 20 mai. Le 2 juin, ses passeports américain et russe lui ont été confisqués, l’empêchant de repartir.

Le sort de la journaliste rappelle celui d’Evan Gershkovich, un reporter du Wall Street Journal détenu à Moscou depuis son interpellation le 29 mars, en plein reportage – la première affaire de ce genre depuis le temps de l’URSS. Lui est accusé d’espionnage, un crime passible de 20 ans de prison qu’il conteste, tout comme son journal et les autorités américaines. Le 26 mars, il a vu sa détention provisoire prolongée jusqu’au 30 juin.

Plusieurs citoyens américains ont été arrêtés et condamnés ces dernières années à de lourdes peines en Russie. Washington, qui soutient Kyiv face à l’armée russe depuis deux ans, accuse Moscou de les prendre en otage pour les échanger. Vladimir Poutine a quant à lui récemment dit vouloir négocier un échange de prisonniers avec Washington concernant Evan Gershkovich, évoquant le cas d’un condamné pour un assassinat commandité attribué à la Russie qui est actuellement détenu en prison en Allemagne.