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Libération
Retour au pays

Le journaliste Evan Gershkovich et deux autres anciens prisonniers en Russie sont arrivés aux Etats-Unis

Joe Biden et Kamala Harris ont accueilli dans la nuit du jeudi 1er août les trois anciens détenus, dont l’ex-Marine Paul Whelan et la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva, de retour sur le sol américain après des mois, voire des années de détention arbitraire, libérés dans le cadre d’un vaste échange de prisonniers.
Les prisonniers libérés avec le président Joe Biden et la vice-présidente Kamala Harris, jeudi 1er août sur la Joint Base Andrews, dans le Maryland. (Nathan Howard/REUTERS)
par Salomé Kourdouli, envoyée spéciale à la base militaire aérienne de Joint Base Andrews, dans le Maryland
publié le 2 août 2024 à 8h14

L’air est chaud et moite, la brise se fait rare. Les lumières de l’avion approchent du tarmac pendant que les gyrophares du convoi présidentiel clignotent. Lentement, un groupe marche vers l’avion. La porte s’ouvre. Ils sont là. Libres. Le journaliste américain Evan Gershkovich, l’ex-Marine Paul Whelan et la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva sont arrivés aux Etats-Unis jeudi 1er août au soir (vendredi 2 août au matin en France), au terme d’un échange de prisonniers avec la Russie. Accueillis par le président américain Joe Biden et la vice-présidente Kamala Harris, les trois Américains libres ont retrouvé leurs familles dans l’émotion. Larmes et sourires se mêlent. La sœur de Paul Whelan, Elizabeth Whelan, l’enlace, la mère d’Evan Gershkovich couvre de baisers son fils, l’époux et les deux filles d’Alsu Kurmasheva l’enveloppent dans un câlin familial.

«Ça va bien, c’était un bon vol», sourit Evan Gershkovich, répondant à quelques questions de la presse. Le reporter du Wall Street Journal avait été arrêté en mars 2023 pendant l’un de ses reportages dans l’Oural. Il avait été condamné à seize ans de prison pour «espionnage» il y a deux semaines dans un procès expéditif. «Attendez, je dois saluer mon ami», dit-il, en croisant le regard d’une de ses connaissances parmi les journalistes. Il retrouve aussi plusieurs collègues du Wall Street Journal, dont la rédactrice en chef du quotidien new yorkais Emma Tucker. Pendant ces quelques mots adressés à la presse, jamais le journaliste ne laisse paraître ses 491 jours passés en prison, préférant les sourires et blagues face à ses confrères.

«Je suis juste un peu fatigué», répond de son côté Paul Whelan, ancien Marine américain arrêté en 2018 et emprisonné depuis pour «espionnage». Que dire aux personnes encore derrière les barreaux ? «Tenez bon, on vient vous chercher.»

«C’est un sentiment merveilleux»

Alsu Kurmasheva a quant à elle préféré rester aux côtés de sa famille toute la soirée. La journaliste employée depuis 1998 par Radio Free Europe avait été arrêtée l’année dernière, alors qu’elle était en Russie pour rendre visite à sa mère malade. Elle a été condamnée à six ans de prison en juillet pour avoir diffusé de «fausses informations» sur l’armée russe. Alors qu’elle retrouvait ses deux filles, son mari s’est retourné vers les caméras, sourire jusqu’aux oreilles et poings en l’air, triomphant. Le président s’est lui aussi approché de ces retrouvailles pour souhaiter un bon anniversaire à l’une des filles de la reporter, qui fête ses 13 ans ce vendredi.

Après ce court échange avec la presse, les trois Américains se sont dirigés vers une salle de l’aéroport avec leurs familles. Tous devaient embarquer à nouveau dans l’avion plus tard dans la nuit pour rejoindre le Texas. Une longue journée s’achève ainsi pour les prisonniers. Ils ont quitté la Russie jeudi matin pour rejoindre la Turquie, qui a procédé à l’échange de prisonniers. Puis ils se sont envolés aux Etats-Unis, sur la base militaire où atterrit habituellement l’Air Force One, non loin de Washington.

«C’est une sensation merveilleuse. Cela faisait longtemps qu’on l’attendait, a déclaré Joe Biden. J’étais absolument convaincu que nous pouvions y arriver. J’étais sincère lorsque j’ai dit que les alliances faisaient la différence. [Les alliés] se sont mobilisés et cela a beaucoup compté.» A ses côtés, la vice-présidente et candidate à l’élection présidentielle Kamala Harris a loué l’action du locataire de la Maison Blanche : «C’est un témoignage extraordinaire de l’importance d’avoir un président qui comprend le pouvoir de la diplomatie.»

Les trois Américains font partie d’un échange de prisonniers âprement négocié depuis plusieurs années par Joe Biden et finalement exécuté à Ankara. Cet échange de prisonniers – la Russie a libéré quinze personnes, contre dix personnes libérées par les Etats-Unis, l’Allemagne, la Slovénie, la Pologne et la Norvège – est le plus important depuis la fin de la guerre froide.