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Récompense

Le prix Sakharov décerné aux opposants vénézuéliens Maria Corina Machado et Edmundo Gonzalez Urrutia

Figures de proue de l’opposition vénézuélienne face au président Nicolás Maduro et sa politique autoritaire, les deux lauréats ont été récompensés ce jeudi 24 octobre.
Maria Corina Machado et Edmundo Gonzalez Urrutia, respectivement cheffe et candidat de l’opposition vénézuélienne, à Caracas le 30 juillet 2024. (Yuri Cortez /AFP)
publié le 24 octobre 2024 à 13h07

Le prix Sakharov, plus haute distinction de l’Union Européenne pour les droits humains, a été décerné jeudi 24 octobre à Maria Corina Machado et Edmundo Gonzalez Urrutia, respectivement cheffe et candidat de l’opposition vénézuélienne à la présidentielle de juillet. «Edmundo et María ont continué de se battre pour une transition libre, juste et pacifique du pouvoir et ont défendu sans crainte les valeurs qui sont chères à des millions de Vénézuéliens et à ce Parlement : la justice, la démocratie et l’État de droit», a déclaré la présidente du Parlement européen Roberta Metsola. «Le Parlement se tient aux côtés du peuple vénézuélien et de María et Edmundo dans leur lutte pour l’avenir démocratique de leur pays», a-t-elle ajouté.

Les deux lauréats s’étaient ont mené l’été dernier la campagne présidentielle de l’opposition face au chaviste Nicolás Maduro. D’abord choisi candidate lors de primaires qu’elle avait largement remporté, María Corina Machado avait dû renoncer à se présenter. Elle était visée par une mesure d’inéligibilité qui pesait contre elle, pour de supposées fraudes administratives lors de son mandat de député dix ans.

C’est donc Edmundo González Urrutia, ancien diplomate à la retraite, qui l’avait remplacé au pied levé et de manière inattendu. Porté par la popularité de la première, les sondages le plaçait en bonne voie pour battre Nicolás Maduro dans les urnes, et mettre ainsi un terme à vingt-cinq ans de mainmise du chavisme sur le Venezuela. Mais au terme du scrutin, le Conseil national électoral, très proche du pouvoir, a proclamé la victoire de Nicolás Maduro avec un peu plus de 51 % des voix, sans pour autant présenter les preuves de son triomphe, ce qui a poussé l’opposition à crier à la fraude.

Après la réélection contestée du président, des dizaines de milliers de manifestants, essentiellement issus des quartiers populaires, étaient sortis dans les rues. Face à ces vagues de contestations, le gouvernement avait répondu par la force, et maté les protestations par la répression policière.

Des engagements pour les droits humains

María Corina Machado, ingénieure de 56 ans, appartient à l’aile la plus radicale de l’opposition. D’idéologie libérale, elle défend un modèle de «capitalisme populaire», où «l’individu et la famille sont au centre, et non l’Etat». En 2013, elle disait à Libération : «Je suis pour un pays de propriétaires, d’entrepreneurs, de travail, d’effort.» Elle a défendu la privatisation de compagnies publiques comme PDVSA (pétrole) ou Corpoelec (électricité). Et a soutenu les sanctions prises contre son pays par l’administration Trump.

L’opposant vénézuélien Edmundo González Urrutia, beaucoup plus centriste idéologiquement, l’a rejoint pour un duo improbable et pourtant très populaire dans les sondages. Mais un peu plus d’un mois après la réélection de Nicolás Maduro, l’ancien diplomate a dû fuir son pays, menacé d’arrestation pour avoir refuser de reconnaître la victoire de son rival alors que lui-même revendique avoir gagné haut la main – avec 67 % des voix selon plus de 80 % des procès-verbaux récupérés par son camp.

Bardella vote Musk

Le «prix Sakharov pour la liberté de l’esprit» est décerné chaque année, depuis 1988, à des individus et à des organisations défendant les droits humains et les libertés fondamentales. Il porte le nom du physicien et dissident soviétique Andreï Sakharov et est doté d’un prix de 50 000 euros. La délégation française du groupe Socialistes et Démocrates, qui avait proposé de décerner le prix à «Women Wage Peac» et «Women of the Sun», deux organisations israélienne et palestinienne qui travaillent de concert pour la paix au Proche-Orient, a déploré «une occasion manquée pour promouvoir la paix et la réconciliation» au Proche-Orient.

Le troisième finaliste qui avait été retenu cette année était Gubad Ibadoghlu, un économiste et activiste en détention en Azerbaïdjan. L’extrême droite européenne, dont le groupe des Patriotes dirigé par Jordan Bardella, avait proposé, sans succès, de remettre le prix au milliardaire Elon Musk pour sa contribution à la «liberté d’expression».